Journée internationale du droit des femmes - Lucile Peytavin ("Le coût de la virilité") : "La virilité coûte 100 milliards d'euros par an à la France"
En France, les actes de délinquance sont commis à une écrasante majorité par les hommes. Lucile Peytavin, historienne et membre du laboratoire de l'égalité, estime que le système viril que prône notre société a un coût énorme pour l'État français. Son essai "le coût de la virilité"(ed. Anne Carrière) revient sur le manque à gagner pour la France et pose une question : "N'aurions-nous pas tous intérêt à nous comporter comme les femmes?!"
Et si, en cette Journée internationale consacrée à la lutte pour l’égalité des droits entre les hommes et les femmes, on battait en brèche la virilité ? Trop souvent considérée comme un acquis, la virilité gangrène notre système et nous emprisonne. Dans un essai intitulé "Le coût de la virilité. Ce que la France économiserait si les hommes se comportaient comme les femmes) (éd. Anne Carrière), l’historienne Lucile Peytavin expose tous les bénéfices pour la France à se défaire de son système viriliste. Si l’on se fie à ses calculs, ce bénéfice pourrait s’élever à 100 milliards d’euros par an pour les caisses de l’État. "La virilité a un coût direct pour l'État, qui va se traduire par des frais en services de justice, de forces de l'ordre, de services de santé. Et également, un coût indirect qui est supporté par la société et qui se traduit par des souffrances physiques et psychologiques pour les victimes, mais qu'on peut estimer financièrement."
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La virilité n’est pas un acquis
Souvent, on pense que la virilité est une affaire masculine. En réalité, il s’agit avant tout d’une construction. Les hommes ont été éduqués à la virilité. Si les chiffres prouvent que le sexe masculin est davantage plus violent que le sexe féminin (en France, les hommes sont responsables de l'écrasante majorité des comportements associaux), "ni la testostérone, ni le cerveau ne les prédéterminent à agir ainsi". Les hommes ne sont donc pas biologiquement des personnes violentes. La raison vient plutôt de l’éducation. "Les sciences de l’éducation ont monté qu’il y a une acculturation des garçons à la violence dès leur plus jeune âge, puisqu’on les éduque avec ces valeurs viriles qui construisent cette violence."
Tous victimes
Longtemps portée aux nues et promue, la virilité n’a jamais été contestée. Pourtant, Lucile Peytavin l’écrit, on en est tous victimes. Même si les femmes en sont les grandes victimes, les hommes sont indirectement lésés par ce schéma servant à asseoir sa suprématie : "Les hommes qui ne répondent pas aux injonctions de la virilité sont rejetés. Elle fait des victimes chez les hommes qui répondent à ses propres injonctions, notamment les hommes qui vont vouloir montrer qu’ils sont forts et qui vont se montre en danger."
Cela se traduit dans les faits par des statistiques. Les hommes ont trois fois plus de probabilité de mourir avant 65 ans et d’une mort évitable, que les femmes, puisqu’ils vont davantage se mettre en danger.
"Les méfaits de la virilité"
La virilité est un carcan dont il est possible de se défaire. Tout d'abord, par ce que l'historienne appelle "une prise de conscience des méfaits de la virilité". Si on s'accorde tous pour dire que la virilité a des conséquences financières et psychologiques délétères, pourquoi continuer de promouvoir un système nuisible ?
La prise de conscience permet un éveil et une éventuelle transmission aux générations qui nous succèdent. "L'éducation des garçons à travers les valeurs viriles les conduit à ces comportements associaux. Si on éduquait les garçons à travers les valeurs qui sont transmises aux filles, qui sont davantage des valeurs d'empathie, d'altruisme, de respect des règles, on économiserait ce coût (100 milliards d'euros par an), et les hommes se comporteraient comme les femmes."
Et si, finalement, tout était une question d'éducation et de volonté ?
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