Manon Lanza se confie sur les insultes et le harcèlement massif dont elle a été victime pendant le GP Explorer : "Ils écrivaient : 'Tu ferais mieux de rester dans ta cuisine'"
Invitée du nouveau podcast de France Inter, "Mentionné.e", la sportive Manon Lanza est revenue sur le cyberharcèlement de masse qu'elle a subi après avoir participé au GP Explorer en 2023, une course de Formule 4 organisée par le youtubeur Squeezie. La compétition, suivie par plus d'un million de spectateurs sur Twitch, avait été ternie par une vague de sexisme à l'égard de la participante.
Le 9 septembre 2023, plusieurs Formules 4 se sont affrontées lors du GP Explorer 2, organisé par le youtubeur Squeezie, sur le circuit Bugatti du Mans. Dans l'un des véhicules, Manon Lanza, sportive et influenceuse, dispute la course sous les couleurs de l'écurie Alpine, comme elle l'a déjà fait l'année dernière. Alors que les concurrents roulent sur leur circuit depuis quelques minutes, Manon Lanza entre en collision dans un virage, durant le deuxième tour, avec l'influenceur Maxime Biaggi, dont la carrière est alors en pleine ascension.
Les deux pilotes doivent alors évacuer le circuit et dire adieu à la compétition. La jeune femme, atteinte d'un choc thoracique et d'une hernie cervicale, est évacuée. Maxime Biaggi, bien que sain et sauf, est éliminé de la course, qui a pu se poursuivre avec les pilotes restants. C'est là que les choses se gâtent : une masse de commentaires sexistes et d'insultes à l'encontre de Manon Lanza s'abat dans le tchat du stream (l'événement est diffusé en live sur Twitch, devant plus de 1,3 million de personnes) et inonde aussi les réseaux sociaux.
"Je me dis 'Ça ne m'étonne pas'"
Si tout cela reste un accident, on accuse Manon Lanza d'avoir gâché la course, et particulièrement celle de Maxime Biaggi. Une vague de haine difficile à affronter, comme elle l'a confié au nouveau podcast de France Inter "Mentionné.e". Comme elle l'a expliqué, ses proches ont d'abord voulu la préserver face à la violence des propos qui lui étaient adressés : "Je suis à l'hôpital, sous perfusion, on m'a fait faire plein de scanners, plein de trucs, et j'ai mon meilleur ami qui vient me ramener mes affaires et qui me dit 'N'ouvre pas ton téléphone, ne regarde pas, ils sont un peu en train de se déchaîner.'"
Une réaction à laquelle Manon Lanza est malheureusement habituée : "Je me dis 'Ça ne m'étonne pas, en fait.' Je me suis dit 'Je suis une nana, j'ai l'habitude de pratiquer des sports largement pratiqués par des hommes (comme le motocross ou le skate ; ndlr) et je me suis dit qu'il y allait forcément y avoir des remarques. Après je ne connaissais pas l'ampleur de ce que ça allait créer derrière."
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"Tu ferais mieux de rester dans ta cuisine"
Manon Lanza reçoit des messages du type "quelle idée de mettre des meufs partout", "fallait s'entraîner au lieu de se faire enc*ler comme une grosse chienne dans les vestiaires pour être dans le GP", "grosse p*te tu ferais mieux de rester dans ta cuisine", "t'as n*qué la course", "pauvre Maxime"... "Du sexisme", lâche-t-elle, après avoir lu les commentaires à voix haute dans le podcast "Mentionné.e".
D'autant plus que beaucoup d'internautes ont d'abord eu le réflexe de s'attrister pour Maxime Biaggi, qui a dû faire une croix sur la course et qu'on voyait encore à l'écran, dépité. "Je pense que c'est ça qui a aussi créé ce déferlement de haine, la manière dont ça a été géré en termes de live. Ils ont vraiment insisté sur les images qu'ils avaient, Maxime en pleurs, accoudé contre un mur, en boule... Il n'y avait pas d'images, ils auraient dû filmer au moins une ambulance qui part, pour montrer que ce n'était pas juste 'Manon qui a n*qué la course de Maxime et puis basta.' (...) Ce n'était pas moi qui étais visée en tant que Manon Lanza, on insultait toute la gent féminine, c'est comme ça que moi je l'ai vu. (...) Si aujourd'hui on en est encore à dire 'Femme au tournant mort au volant', c'est qu'il y a encore du travail."
"Je ne me suis pas du tout sentie soutenue"
Ce flot de commentaires sexistes a été dénoncé par plusieurs personnalités issues d'Internet, comme Squeezie, qui a profité d'un live sur Twitch pour défendre la jeune femme : "Je ne veux pas m’énerver… Il y a un écart entre le nombre et la quantité de messages reçus en fonction de si la personne est un homme ou une femme. Il y a aussi un écart dans la forme des messages, qui est beaucoup plus violente lorsqu’il s’agit d’une femme. (...) Tous les petits chiens qui sont fermés d’esprit, cassez-vous de ce live, de Twitch et des réseaux. On vous déteste et vous nous faites honte. Vous nous cassez les c…., dégagez de là par pitié."
Mais certains pairs masculins de Manon Lanza ont tardé à condamner le comportement des membres de leur communauté, ce qu'elle regrette : "Il y en a quelques-uns qui ont pris la parole et je les remercie vraiment, parce que je pense que c'est très important pour eux de prendre la parole, mais sur le moment je ne me suis pas du tout sentie soutenue." À propos de la déclaration de Squeezie, elle déclare : "C'était un peu tard. Je l'ai eu au téléphone, je l'ai même vu le lendemain, je suis sortie de l'hôpital et le lendemain matin je suis allée le voir. Il m'a dit qu'il allait en parler, qu'il allait faire quelque chose, mais pour moi, le mal était déjà fait. (...) J'aurais aimé que ce soit mieux géré. (...) C'est moi qui les ai appelés pour leur dire que j'étais en train de me faire lyncher. (...) Je leur ai dit 'Vous voyez ce qu'il se passe, là ? Vous faites quoi ? (...) Il est temps de réagir.'"
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