Secrets de famille - Cyriel : "La veille de mes 16 ans, mon père m'apprend qu’il va ouvrir une maison close"

La veille de son seizième anniversaire, Cyriel Mercier apprend de la bouche de son père une nouvelle qui va faire basculer sa vie. Son père décide d'ouvrir une maison close. Un choix de carrière qui aura un impact sur sa vie de femme. Elle relate son adolescence peu commune dans les coulisses d’une maison close dans son podcast "Mon père, ce macro" et se confie au micro de Yahoo.

Cyriel Mercier a très vite compris que son père n’était pas comme les autres. Ce self-made man s’est reconverti plus d’une fois dans la vie : cascadeur, magicien, pompier, ambulancier, commissaire priseur, vendeur de voitures… Mais, c’est à 16 ans que la jeune fille comprend que son histoire familiale prend une tournure singulière. En rentrant de l’école, son père lui annonce tout de go : "Pupuce, papa va ouvrir une maison close". Dans un premier temps, Cyriel Mercier confie "ne pas mesurer l’ampleur et l’impact, même si je sais ce que ça veut dire", souffle-t-elle. Plus tard, lorsqu’elle comprend que l’"affaire se concrétise", l'ado commence à envisager le destin "peu fréquentable" de sa famille. Cyriel s’emmure dans la honte. "Il ne fallait pas en parler sur tous les toits. Je n’avais personne autour de moi qui avait ce métier-là."

La surprise laisse très vite la place à la colère. "Je me rebelle parce que je ne trouve pas ça normal, je ne trouve pas ça glorieux." L’adolescente perd les repères dont elle a besoin pour se construire. "Tous mes codes sont cassés. Il avait cassé un certain confort parce que juste avant ça, il était commissaire priseur." Cyriel bascule dans le monde des "adultes" avec un père qui fait montre d’une grande transparence. "À 7 ans, je savais déjà ce qu’était un strip-tease". À l’heure où l’on vit ses premiers émois amoureux, la jeune femme voit également ses rêves de jeune fille en fleur s’envoler. "Mon père me disait que tous les hommes allaient dans les maisons closes. Ça, ça casse le mythe du prince charmant. Le romantisme est proche de zéro." Des considérations qui l’amènent à se questionner sur son rapport à la fidélité. "Il faut lever le voile sur l’hypocrisie autour de cela. Par rapport à la fidélité, j’ai envie de dire à partir de quand commence-t-elle ? Est-ce à partir d’une pensée, d’un baiser, d’un acte sexuel ? Je me sens juste moins naïve par rapport à tout cela. J’ai un regard moins cucul la praline sur la société."

Si elle ressent une forme de honte à l'idée d'être la fille du "macro", son père lui, ne cache rien de son activité. "Même si je savais ce qu’était une maison close, je ne m’étais jamais posée la question quant à son fonctionnement." L’adolescente devient alors spectatrice, en se glissant dans les coulisses de la maison close gérée par son père. "J’étais très contemplative. Étant donné que je ne cautionnais pas ce que mon père faisait, je ne voulais pas me rapprocher des femmes qui travaillaient là. Je restais dans mon coin et je les regardais. Je découvrais aussi un milieu auquel très peu de gens avait accès parce que pouvoir accéder aux coulisses d’une maison close, c’est assez rare. Soit vous êtes tenancier/tenancière, soit vous y travaillez." Et quel image porte-t-on alors sur les hommes, à l’heure où l’on vit ses premiers émois amoureux ? "Les clients, je ne les ai jamais croisés. Étant donné que je n’y travaillais pas, je ne pouvais pas être vue. Ça pouvait prêter à confusion."

Cette adolescence chamboulée par l’activité de son père a eu de nombreuses répercussions sur elle. "J’ai eu énormément de mal à trouver une certaine stabilité, à avoir confiance aux hommes." Pendant 5 ans, la fille du "macro" comme elle le surnomme dans son podcast, fréquente les coulisses de la maison close. "J’ai arrêté d’y aller parce que je suis devenue épileptique. Je le suis devenue à 18 ans et demi. Et ensuite, on constatait que je faisais les trois quarts du temps une crise après avoir été dans une maison close ou dans la maison. Mes parents ont eu une discussion et ma mère a dit à mon père que sa profession m’affectait énormément et que c’était peut-être mieux de me protéger de cela et d’arrêter d’y aller."

Avec le recul, la jeune femme estime que la profession de son père n'a pas eu que des conséquences négatives sur sa vie. "J'ai appris la notion du 'non' et du consentement en fréquentant les travailleuses du sexe. Mon père me répétait qu'elles avaient le pouvoir de dire "oui" ou "non"."

Le podcast "Mon père, ce macro", écrit et réalisé par Cyriel Mercier, est à retrouver ici.