Secrets de famille - Sous le choc, Patrick découvre l'origine terrible des cauchemars de son frère : "Sa femme en a parlé comme si c'était une évidence"

Patrick a grandi dans une famille unie, convaincu qu’il a toujours été proche de son frère de deux ans de moins que lui : "Mes parents s’aiment depuis toujours. Je considère mon frère comme mon meilleur ami. Il a fait une dépression sévère il y a un an et j’étais là pour lui. J’ai pris des jours de congés pour rester avec lui à la maison. J’étais là pour l’aider à se doucher quand il n’arrivait plus à sortir du canapé. Mon frère, c’est vraiment la personne la plus importante du monde pour moi. On se relayait avec sa femme pour s’assurer qu’il n’était jamais seul et qu’il ne se faisait pas de mal. Mais même avec les médicaments que lui ont donné les médecins, je trouvais qu’il faisait beaucoup de cauchemars. J’en ai donc parlé avec sa femme. Et c’est là qu’elle m’a dit que c’était courant chez lui. Qu’elle l’avait toujours connu comme ça et que c’était à cause d’une agression sexuelle dans son enfance. Elle en a parlé comme si c’était une évidence et comme si je n’avais pas besoin de détail. J’ai d’abord été sous le choc. Mon frère avait donc un secret. Un secret énorme dont il ne m’avait pas parlé. Nos parents étaient peut-être au courant. Je ne savais pas. Il y avait d’autres choses plus urgentes mais j’ai eu un sentiment de trahison."

Mes parents étaient au courant

Quelques jours plus tard, il confronte ses parents : "J’avais besoin de savoir si c’était quelque chose avec lequel mon frère avait vécu tout seul ou s'il avait demandé de l’aide à nos parents. Je voulais savoir aussi à qui je devais en vouloir. À lui tout seul ou à toute ma famille ? C’est un peu égoïste de penser comme ça, mais je n’ai pas pu faire autrement. J’aurais dû penser à ce que mon frère avait vécu, à sa souffrance à l’époque et à sa souffrance à présent mais c’était quasiment impossible pour moi de voir ça sous ce prisme-là. J’étais obnubilé par le fait que j’avais été mis de côté. J’ai même pensé que je ne connaissais pas mon frère au final. C’est très excessif. On a quand même vécu des tonnes de choses ensemble. Bref, j’en parle à nos parents et ils sont d’abord choqués. Je comprends ensuite qu’ils étaient au courant. Mon frère avait 14 ans à l’époque. C’est lui qui a choisi de ne pas en parler, ni à moi ni à d’autres, et de ne pas porter plainte. Mes parents lui ont juste fait rencontrer plusieurs médecins dont des psy. Mais le reste, mon frère l’a refusé. Mes parents se sont excusés auprès de moi mais ils n’ont pas pu m’en dire plus. Pour eux, et ils avaient raison, il fallait que ce soit une conversation entre nous deux."

Patrick attend que son frère aille un peu mieux pour lui en parler : "Je ne voulais pas l’agresser avec ça, en plus du reste. Je ne comprenais toujours pas pourquoi il ne m’en avait jamais parlé mais je savais aussi que ce n’était pas le moment. Il s’est passé quelques mois avant que je puisse prendre le temps d’en parler avec lui à un moment approprié. On était en train de regarder la télé ensemble, on faisait des blagues et je lui ai partagé ce que j’avais sur le coeur. J’en ai pleuré tellement j’étais touché de le faire et qu’avec le temps, j’avais pensé à à quel point ça avait dû être dur pour lui. Il a pleuré aussi. Il a voulu me raconter toute l’histoire avec ses mots et il s’est excusé aussi. J’ai pu lui dire que je n’attendais pas vraiment d’excuses. Je voulais juste qu’on rétablisse la vérité entre nous. Je voulais juste savoir qu’il n’avait plus ce secret à porter tout seul. On s’est pris dans nos bras, ce qu’on ne fait pas trop d’habitude. Et puis on a repris nos vies."

Patrick n’a plus jamais reparlé de cette histoire avec son frère : "Je me dis que s"il a quelque chose à me dire dessus, il sait qu’il peut le faire. En attendant, je le laisse en paix avec ça. J’ai quand même l’impression que notre relation a passé un cap. Il y a des sourires entre nous qui en disent long. J’aime mon frère. Je l’aime infiniment. Savoir qu’on a réussi à tout partager ensemble, c’est quelque chose de fort aussi. Je ne lui cache rien moi-même. On prend le temps de se voir au moins une fois par mois juste pour se parler de la vie. Ce n’est pas forcément quelque chose de profond mais on parle du monde, de la façon dont on voit les choses, des gens qu’on aime, des rêves qu’on a. Ça arrive que ce soit juste des blagues pendant une heure, mais c’est aussi arrivé qu’on parle très sérieusement de tout ça. On ne se force juste pas. On crée juste le contexte pour vraiment continuer à partager. Parce qu’une relation, même une relation de sang comme ça, ça se nourrit."

Certaines familles cachent des secrets qui peuvent avoir des conséquences sur plusieurs générations. Quels sont ces secrets ? Comment refont-ils surface ? Et enfin, quelles sont les conséquences que cela peut avoir sur les personnes qui les découvrent ? La série "Secrets de famille" revient sur cet épineux sujet du mensonge et de dissimulation au sein même des foyers.

Si vous aussi, vous voulez raconter vos histoires exceptionnelles, vous pouvez envoyer un message à cette adresse : lucilebellan@gmail.com.