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"Les femmes sont très seules avec ça et en manque d’info" : dyspareunie et vaginisme, ces douleurs pendant les rapports sexuels

Ces deux mots sont encore trop peu connus des femmes et des professionnels de santé. Pourtant, ils peuvent détruire leur vie sexuelle et les handicaper au quotidien. La sexologue et sexothérapeute Marie Bareaud nous éclaire sur ces pathologies souvent taboues.

La libération de la parole chez les femmes a permis de mettre en avant leurs besoins et leurs désirs en matière de sexe. Mais ce n’est pas tout. Certaines d’entre elles évoquent également les problèmes qu’elles rencontrent avec leur sexualité. En se baladant sur Twitter, on s’est rendu compte que les mots “vagisme” et “dyspareunie” concernaient beaucoup de femmes. On peut notamment lire : “Moi perso j'aurais adoré connaitre l'existence du vaginisme plutôt que de le découvrir à ce moment là et fondre en larmes de honte”. Ce témoignage illustre du manque d’information des femmes sur le sujet.

On parle de “dyspareunie” et de “vaginisme”

On découvre alors que la dyspareunie et le vaginisme sont des troubles qui touchent de nombreuses femmes. Et pourtant, ces dernières sont très peu informées sur la question et ce mal est souvent trop peu pris en compte par les professionnels. Pour en parler, encore faut-il savoir ce que c’est.

“La dyspareunie c’est vivre une sexualité où il y a de la douleur, avoir mal pendant un rapport sexuel par exemple, que ce soit à l’entrée ou autour de la vulve, dans le vagin ou encore au niveau de l’utérus, nous explique la sexologue et sexothérapeute Marie Bareaud. Le vaginisme, c’est la contraction involontaire des muscles du périnée qui empêche toute possibilité de pénétration. On va vivre une sexualité qui va être exclusivement à l’extérieur du corps parce que le corps ne peut pas envisager une pénétration alors qu’en dyspareunie, la pénétration est possible même si elle fait mal.”

Seules face à la désinformation

La spécialiste précise qu’il existe un lien entre ces deux pathologies “parce que très souvent une femme atteinte de dyspareunie qui force un peu les choses peut générer un vaginisme”. Et pour cause, on distingue le vaginisme primaire - la pénétration est impossible depuis le début de la vie sexuelle - du vaginisme secondaire, qui intervient au bout d’un certain temps (quelques années après le début d’une relation par exemple) alors que la pénétration était jusque-là envisageable. Le problème, c’est que beaucoup de femmes n’osent pas aller consulter “parce qu’elles ont honte” et attendent parfois “plusieurs années ou d’avoir un projet d’enfant” pour prendre rendez-vous chez un professionnel. “Les femmes sont très seules avec ça et en manque d’info. Beaucoup acceptent la douleur en pensant que ça fait partie de la chose alors que non”, lâche Marie Bareaud.

Cette dernière conseille aux femmes souffrant de dyspareunie de “ne pas attendre”. “Plus elles attendent plus le phénomène s’aggrave et risque de se transformer en vaginisme”, nous dit-elle. Le parcours de soins le plus adapté pour celles atteintes de vaginisme ? Aller chez un sexologue, une sage-femme ou un psychologue “en fonction de ce que traverse la femme”. “Le gynécoloque risque de dire : ‘Pour moi il n’y a rien’ ou alors ‘C’est dans votre tête’, ce qui peut être blessant pour les femmes. Mais en fait ce n’est pas si simple. C’est peut-être dans la tête de la patiente mais c’est aussi son corps qui dit quelque chose”, affirme l’experte qui déplore le manque de lien entre gynécologue et sexologue.

De multiples témoignages

Jüne, la créatrice du compte Instagram Jouissance.club, s’est confiée à Yahoo Style sur la dyspareunie dont elle a souffert. Elle nous a raconté comment cela a affecté sa sexualité et le manque d’information qu’elle avait sur le sujet.

“J'ai mis très longtemps à comprendre ce que c'était, d'où cela provenait et comment le traiter. Parce qu'aucun médecin ne m'a expliqué ce que j'avais ni trouvé de problème, nous a-t-elle expliqué. J'ai compris que c'était quelque chose qui était - chez moi - psychologique et qui survenait souvent quand je me lassais et que je perdais un peu de désir pour mon partenaire. Mon corps se rétractait, mon vagin aussi et j'avais des douleurs à la pénétration. J’avais envie que [le rapport] s'arrête.”

Dans le corps et dans la tête

En dehors de son cas personnel, Jüne a reçu de nombreux messages et témoignages de femmes souffrant elles aussi de douleurs pendant les rapports sexuels et qui n’en connaissent pas toujours les causes. “C'est beaucoup lié au mental. (...) C’est souvent, très souvent, trop souvent psychique”, affirme-t-elle. Les douleurs peuvent en effet être dues à une sécheresse vaginale, de l’anxiété, un traumatisme sexuel comme un viol ou encore la peur panique d’avoir un rapport sexuel et d’être pénétrée.

Mais cela peut aussi être lié à un problème d’ordre médical comme une infection gynécologique (mycoses vaginales, certaines IST, etc.), une allergie, l’endométriose ou encore une tumeur pelvienne. Marie Bareaud précise que cela peut aussi être notamment dû à une inflammation des glandes de Bartholin, situées dans les grandes lèvres. “Ce n’est jamais anodin de développer des symptômes à cet endroit-là. Tout comme une infection urinaire chronique mérite qu’on s’interroge”, déclare la sexologue.

Si le sujet est encore trop peu abordé, les femmes prennent de plus en plus la parole, à commencer par Camille - la créatrice du compte Instagram Je m’en bats le clito - qui s’est livrée à coeur ouvert sur son vaginisme dans l’un de ses posts. La jeune femme a avoué qu’elle s’était “forcée” à avoir des rapports sexuels.

Sur Twitter, plusieurs internautes ont révélé qu’elles souffraient de vaginisme et qu’elles se sentaient très souvent incomprises - que ce soit par leurs proches, leur compagnon ou leur gynécologue. À lire certains témoignages, on apprend même que certains professionnels de santé ont donné des conseils douteux à leurs patientes.

Une jeune femme a lancé un thread sur le réseau social en demandant à ses abonnés ce qu’ils auraient aimé savoir avant de faire leur première fois. Elle, aurait “adoré connaitre l'existence du vaginisme plutôt que de le découvrir à ce moment là et fondre en larmes de honte” et elle n’est pas la seule.

Ces nombreux témoignages attestent d’une méconnaissance de la pathologie tant chez les femmes qui en souffrent que parmi le corps médical. Aucune étude en France ne permet pour l’heure de déterminer le nombre exact de femmes concernées par la dyspareunie et le vaginisme. Marie Bareaud confie qu’un tiers de sa patientèle consulte pour des problèmes de dyspareunie et vaginisme. Il est donc nécessaire pour les femmes de ne plus se sentir marginalisées par ces pathologies. L'accompagnement par un professionnel permet véritablement de se sortir de la dyspareunie et du vaginisme.

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