Journée mondiale de la vasectomie : "C’est l’opération qui suscite énormément de peur "

En France, chaque année, 13000 vasectomies sont pratiquées sur les hommes. Un chiffre relativement bas si l’on compare avec les autres pays. Pourquoi les Français craignent-ils cette intervention ? Eléments de réponse avec Guillaume Daudin, journaliste et co-auteur de l'enquête "Les contraceptés"(éd. Steinkis).

Aux États-Unis, la vasectomie se fait entre "bros". Les hommes s’organisent même des virées "entre potes" pour cette opération. En France, les mentalités ne sont pas aussi libérées. Pour preuve : seuls 13000 hommes se font stériliser chaque année. Chez les femmes, la stérilisation définitive, qui correspond à la ligature les trompes, est six fois plus pratiquée. Alors pour quelles raisons les Français rechignent-ils à la vasectomie ?

Une solution fiable

Lorsque l’on est dans une relation stable sans désir d’enfant, c’est le moyen de contraception le plus fiable. Mais, en France, les vasectomies sont très "taboues". Pour Guillaume Daudin, journaliste et co-auteur de l’étude "Les Contraceptés", cette opération "suscite énormément de peur" chez les hommes car elle touche à leurs fonctions reproductives et, à l’image de virilité qui y est associée. "Il y a une espèce de mythe dès que l’on atteint aux fonctions sexuelles. On risque la perte de virilité. On ne banderait plus. On n’éjaculerait plus. La virilité serait perdue.".

Vidéo. "La vasectomie règle tous les problèmes"

"Chez un généraliste en 20 minutes"

Ce mythe de la virilité écornée associé à la vasectomie expliquerait donc le manque d’engouement. Pourtant, comme le précise Guillaume Daudin, l’opération est plus "simple" que la ligature des trompes, une intervention six fois plus pratiquée chez les femmes. "C’est une intervention plus simple. Une opération avec moins d’effets secondaires. Ça peut se faire chez un médecin généraliste, sous anesthésie locale, en 20 minutes s’il est bien formé.". Tout comme la ligature des trompes, la stérilisation masculine est frappée du sceau de l’irrévocabilité. Là encore, d'après le journaliste, l’écueil peut être contourné : "On peut congeler du sperme si jamais on change d’avis par la suite. Il y a vraiment peu de difficultés avec cette opération".

Le cas de la France

Interrogée par le journal l’Humanité, l’historienne Élodie Serna, auteure de "Opération Vasectomie", un ouvrage qui retrace l’histoire de la vasectomie dans le monde, relate qu'"il a fallu attendre la loi de 2001 pour que la vasectomie soit autorisée en France, mais ce n’est pas pour autant que le nombre d’opérations a décollé. Ce n’est que depuis les années 2010 qu’un frémissement s’opère".

Pourquoi la France se montre-t-elle si réticente ? Guillaume Daudin invoque d’autres raisons.

"En France, il y a un pouvoir médical imprégné de patriarcat et d’une vision assez nataliste." Des déclarations corroborées par l’historienne : "La France est restée à l’écart de ce mouvement en raison de l’influence de la religion catholique. Sans compter la pression nataliste : la France a longtemps recherché une population nombreuse".

Vidéo. La liste des contraceptifs masculins

"Les hommes doivent s’emparer de la question"

Dans l’enquête "Les Contraceptés", les journalistes Stéphane Jourdain et Guillaume Daudin montrent que si c’est en France que l’on a développé le plus de moyens de contraception alternatifs pour les hommes, c’est aussi dans l’Hexagone que le manque d’intérêt des hommes pour la contraception est l'un des plus manifestes. Pour palier les problèmes de charges mentale et contraceptive des femmes, l’auteur invite les hommes à s’emparer de la question pour faire pression sur les pouvoir publics.

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