Pourquoi les hommes ont-ils autant de mal à prendre les douleurs des règles au sérieux ?
Ces dernières années, le débat sur les règles et les douleurs qu'elles entraînent est devenu de plus en plus fréquent, notamment avec plusieurs pays réfléchissant à des congés spéciaux pour les personnes menstruées. Pourtant, les hommes cis continuent à remettre en question les douleurs liées aux menstruations. Et ce, en dépit des nombreux témoignages de femmes et des études sur la question.
Demandez à n'importe quelle personne de votre entourage si le fait d'avoir ses règles est agréable, et la réponse sera bien évidemment non. Même si les sensations peuvent varier d'une personne à l'autre, en fonction de leur sensibilité et de leur résistance à la douleur, l'inconfort est toujours au rendez-vous, et il s'accompagne bien souvent de douleurs plus ou moins fortes : nausées, crampes au niveau de l'utérus, douleurs dans le bas-ventre et au niveau des reins... Les personnes qui souffrent d'endométriose sont généralement dans une situation bien pire encore, difficile à décrire à celles et ceux qui ne l'ont jamais vécue. Et pourtant, il ne se passe pas une journée sans que les douleurs liées aux cycles menstruels ne soient remises en cause par des personnes qui ne les ont jamais vécues et ne les vivront jamais : les hommes cis.
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La réalité des douleurs confirmée par la science
La situation a été particulièrement mise en lumière il y a quelques semaines, lorsqu'une entreprise située à Montpellier a annoncé offrir un jour de congé par mois aux salarié·e·s souffrant de règles douloureuses, pour leur permettre de se reposer et de subir ces douleurs dans le confort de leur domicile. Une avancée largement saluée par les personnes concernées, d'autant que 68% des personnes réglées sont en faveur de ce genre d'initiative, selon un sondage Ifop pour 20 Minutes. Mais, parmi les commentaires sur les réseaux sociaux, des dizaines et des dizaines d'hommes scandalisés. "À quand des congés pour les crises hémorroïdaires ?" "Les meufs vont en profiter pour prendre des week-ends prolongés." "Il va forcément y avoir des abus." "C'est de la discrimination inversée, à quand un congé gueule de bois ?"... Autant de commentaires particulièrement violents pour les personnes concernées qui auraient bien besoin de jour de repos. D'autant que dans de nombreux cas, les comparaisons n'ont absolument pas lieu d'être : quel rapport entre les règles et le fait d'avoir une gueule de bois ?
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Bien sûr, ces hommes qui minimisent les douleurs des femmes ont une "bonne excuse" : ils ne les ont jamais ressenties, et ont donc du mal à les appréhender. Pour eux, bien souvent, "les femmes abusent", "ça ne peut pas faire aussi mal qu'un coup de pied dans les couilles", et autres joyeusetés. Mais cela suffit-il pour les remettre en question ? Pas vraiment. Car si la parole des concerné·e·s ne leur suffit pas pour y croire, il existe de nombreuses études sur le sujet. Le spécialiste de la gynécologie de la NorthShore University HealthSystem Frank Tu, ainsi que le professeur en santé de la reproduction de l'University College London John Guillebaud, ont affirmé au site Quartz que les crampes liées aux menstruations pouvaient être "aussi douloureuses que le fait d'avoir une crise cardiaque". Une douleur bien différente, donc, du fameux "coup de pied dans les testicules", d'autant qu'il s'agit d'un mal qui revient tous les mois, pendant de nombreuses années. Une personne réglée a en moyenne 450 cycles menstruels au cours de sa vie : pourriez-vous imaginer avoir 450 crises cardiaques, et que l'on vous dise "Franchement, tu exagères, ça va passer" ?
Les hommes ont besoin de ressentir la douleur pour se mettre à la place des femmes
La comparaison avec un coup de pied dans les testicules ou une crise cardiaque illustre toutefois un propos intéressant. Pour pouvoir se mettre dans la peau des personnes qui ressentent ce type de douleur, les non-concernés ont besoin de la ressentir à leur tour, ou tout du moins quelque chose de similaire. Sinon, les plus machos d'entre eux n'arrivent pas à se mettre à la place des personnes réglées, même si les choses commencent à évoluer dans le bon sens et que l'empathie semble enfin se développer.
Aussi, pour permettre aux sceptiques de pouvoir ressentir la douleur que les règles représentent, une expérience a été mise en place : le simulateur de règles Covington. Cet appareil se place sur le bas-ventre et permet de recréer les crampes d'utérus liées aux règles. Plusieurs vidéos ont fait le tour de TikTok, et alors que les hommes se plient de douleurs, les femmes encaissent de façon tout à fait stoïque en estimant qu'elles ont connu pire durant leurs cycles. Avec généralement toujours la même conclusion : alors, c'est qui le sexe faible ?