"Je cachais mes bleus", "J'ai des cicatrices", "Je planque ma cellulite" : pourquoi ils portent des manches longues pendant la canicule
Quand l'été et la chaleur s'invite, il est normal de vouloir s'habiller de façon légère : shorts, jupes, tee-shirts... Mais si ces tenues servent de mauvaise excuse à toutes sortes d'individus pour harceler et moquer les autres, les personnes qui se couvrent sont également la cible de critiques et de réflexions désagréables. Et si on arrêtait de vouloir toujours commenter la tenue de nos pairs ?
"Mais t'as pas chaud avec ton jean et tes manches longues ?" cette phrase, j'ai dû l'entendre une bonne centaine de fois pendant ma jeunesse. L'été, même au soleil, même quand le mercure dépassait allègrement les 30 degrés, je portais des vêtements couvrants qui, en plus de me donner chaud, m'attiraient toutes sortes de commentaires. Des commentaires pas nécessairement méchants mais néanmoins embarrassants et déplacés. Pourtant, j'avais une très bonne raison de couvrir mes bras et mes jambes : ma peau très blanche et très sensible ne supportait pas le soleil, et en combinaison avec de la kératose pilaire, je me retrouvais avec des plaques rouges qui me valaient également leur lot de réflexions. Conclusion ? Impossible de gagner, donc autant me couvrir et protéger mon épiderme.
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Récemment, c'est Inès Reg, l'humoriste qui participe actuellement à "Pékin Express", qui a évoqué la raison pour laquelle elle préfère porter des manches longues : elle souffre d'une brûlure sur le bras qu'elle préfère ne pas exposer au regard des autres. Vous voyez où je veux en venir ? Derrière les choix vestimentaires des uns et des autres, il y a parfois des raisons, et leur poser des questions peut les mettre dans l'embarras.
"Sous mes manches, il y a des cicatrices"
Tamara a 32 ans, et quand elle en avait 16, elle a traversé une période très sombre. "J'étais profondément dépressive, et j'ai commencé à me scarifier. Je n'en suis pas fière aujourd'hui, mais à l'époque, c'est l'une des seules choses qui m'a permis de tenir le coup et de ne pas me suicider. J'assume mes cicatrices d'auto-mutilation, mais elles ne sont pas très jolies, et plutôt voyantes, elles attirent les regards. Ça, encore, je peux vivre avec. Les réflexions, en revanche, ça fait trop mal." Lorsqu'elle avait 20 ans, dans un bus, une femme est en effet venue lui reprocher de donner un mauvais exemple à ses enfants. "Ils n'avaient aucun moyen de savoir d'où venaient mes cicatrices, mais cela la dérangeait. J'ai eu honte, j'ai eu envie de me cacher. Surtout qu'elle n'est pas la seule à m'avoir posé des questions indiscrètes au cours de ma vie. Alors, je préfère les dissimuler comme je peux, quitte à avoir chaud."
Les cicatrices sont l'une des premières raisons évoquées par les personnes qui cachent leur peau en été, du moins parmi celles que j'ai eu l'occasion d'interroger. Louis, 24 ans, a également eu droit à son lot de critique. "Je suis un grand brûlé. A la suite d'un accident, j'ai des brûlures qui recouvrent 70% de mes jambes, et à la plage, je suis en jean ou en pantalon, car on m'a trop souvent reproché de faire peur aux enfants avec mes blessures. Mais je m'estime heureux : j'ai l'impression qu'un mec qui reste habillé est encore mieux accepté que pour les nanas. Mais ce n'est pas comme si c'était surprenant."
"Quand on est une victime de violences conjugales, on se cache comme on peut"
Le témoignage de Lily (son prénom a été modifié, pour des raisons d'anonymat), 74 ans, est peut-être encore plus triste. "Durant ma jeunesse, les divorces n'étaient pas encore légion, même quand on avait un mari violent. Il fallait plus ou moins accepter de se faire rudoyer, et ce sont mes amies, ainsi que ma mère qui m'ont expliqué que c'était mon rôle d'épouse de ne pas entacher la réputation de mon mari, et donc de dissimuler les hématomes. Les robes longues, les châles sur les épaules, les petites laines... Je connais bien ça, c'était la norme à l'époque et je savais qu'il ne fallait pas en parler."
Bien des années plus tard, Lily repense à cette époque avec angoisse, et ne peut s'empêcher de s'interroger. "Quand je vois des femmes aux membres couverts en été, forcément, je me dis qu'elles traversent peut-être la même chose que ce que j'ai vécu avant le décès de mon mari. Quand on est une victime de violences conjugales, je sais qu'on se cache comme on peut, alors je cherche des indices : sursauts, difficultés à marcher, regard contrit... Jusqu'à maintenant, Dieu merci, j'ai toujours eu tort mais j'espère que ma vigilance pourra un jour aider quelqu'un", conclut cette septuagénaire très engagée dans la lutte contre les violences faites aux femmes.
"J'aimerais qu'on me laisse tranquille avec mes complexes"
Autre raison qui pousse définitivement un certain nombre de personnes, et en particulier de femmes à se couvrir : les critiques sur le physique. "Je suis grosse, donc non seulement je cache ma cellulite sous des collants, mais en prime, ça m'évite d'avoir les cuisses qui frottent", affirme Josepha, 24 ans. "Et puisqu'il paraît que les collants chair sont moches, d'après Cristina Cordula, eh bien je mets des collants noirs." Est-ce qu'elle a chaud ? "Pas tant que ça", affirme la jeune femme. "C'est toujours mieux que les réflexions désagréables et la sensation d'inconfort physique et mental qui va avec."
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Vous l'aurez compris, les raisons de porter des vêtements couvrants quand il fait chaud sont nombreuses, et peuvent aussi bien cacher des complexes, que répondre à une volonté religieuse, ou encore cacher des choses que l'on ne se sent pas encore en état de montrer. Alors, la prochaine fois que vous aurez envie de commenter la tenue de quelqu'un de "trop couvert", qu'il s'agisse d'un·e proche ou d'un·e inconnue... mieux vaut vous abstenir.
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