Les compléments alimentaires présentent aussi des risques, voici ce qu’il faut surveiller

Les compléments alimentaires présentent aussi des risques pour la santé.
Les compléments alimentaires présentent aussi des risques pour la santé.

SANTÉ - Au Japon, c’est un véritable scandale sanitaire. L’entreprise Kobayashi Pharmaceutical a annoncé fin mars avoir lancé une enquête suite à cinq décès suspects et 114 hospitalisations liés à certains de ses compléments alimentaires. Ils sont fabriqués à partir de levure de riz rouge, un ingrédient censé faire baisser le taux de mauvais cholestérol.

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« On ne sait pas quelle est la cause » de ces décès, précise la professeure Irène Margaritis, qui travaille dans l’unité de l’évaluation des risques liés à la nutrition à l’ANSESMais, ajoute-t-elle, ces tragiques événements montrent que « les compléments alimentaires ne sont jamais anodins ».

Vendus sous différentes formes (gélules, gouttes…), les compléments alimentaires ont pour vocation à compléter l’alimentation de personnes carencées en nutriments (vitamines, fer, magnésium…) ou qui sont dans des situations spécifiques (femmes enceintes, personnes ayant un régime végétalien, ou ne mangeant ni poisson ni fruit de mer, selon l’Anses).

Ils peuvent ainsi être prescrits par un médecin pour combler ces carences. Dans le cs du Japon, ce complément alimentaire visait à faire baisser la cholestérolémie. Mais ils ne sont pas des médicaments, et sont donc disponibles sans ordonnance. D’autres compléments alimentaires sont également vendus dans le but d’avoir des bienfaits plus larges, comme l’amélioration du sommeil, la réduction du stress ou encore pour ralentir la perte de cheveux.

C’est « un concentré de ce que l’on retrouve naturellement dans notre alimentation », qui permet de répondre aux besoins non couverts par cette dernière, mais qui ne la remplace dans aucun cas, explique Irène Margaritis. Leur prise, lorsqu’elle n’est pas encadrée, entraîne de nombreux risques, de l’interaction médicamenteuse au surdosage.

Pas efficaces « dans la plupart des cas »

Avant de prendre des compléments alimentaires, il faut savoir si on en a réellement besoin. « On peut identifier tout seul un signe, comme des douleurs articulaires. Mais il faut identifier la cause, et on ne peut pas poser un diagnostic soi-même. Il faut s’en remettre à un professionnel de santé, idéalement un diététicien nutritionniste », alerte Irène Margaritis. Si leur efficience a été démontrée lorsqu’il y a bien une carence ou un déficit d’apport, identifié par un professionnel de santé, ils ne sont « pas nécessairement efficaces », car certains troubles pour lesquels ils sont pris, comme le stress ou les problèmes de sommeil, sont multifactoriels.

« Ce qui est séduisant dans les compléments alimentaires, c’est qu’il y a une promesse », explique-t-elle, comme réduire la cholestérolémie dans le cas de la levure de riz rouge. « Le consommateur y est très réceptif car il est en attente d’un résultat. Mais c’est plus facile de se dire qu’on prend un complément alimentaire que de se dire que son hygiène de vie n’est pas la bonne. »

Qui plus est, si vous prenez des compléments car vous ne mangez pas assez de fruits et légumes, peu importe la raison, ils ne compenseront jamais leurs effets complets sur la santé. Car certaines substances présentes dans l’alimentation ne se trouveront tout simplement pas dans ces produits de substitution.

Naturel ne veut pas dire sans risque

Aussi, les compléments alimentaires contiennent des substances actives, qui entraînent toujours des risques pour la santé ; à commencer par des effets indésirables. « Les consommateurs se disent que les compléments alimentaires sont naturels, et donc que ça ne peut pas faire de mal. C’est une idée fausse » , prévient Irène Margaritis. L’Anses a par exemple rendu un avis sur la levure de riz rouge, dès 2014, où elle alertait sur des atteintes musculaires et hépatiques « susceptibles d’être liées à la consommation de compléments alimentaires » qui en contiennent.

Il existe également des risques liés aux interactions médicamenteuses, avec deux effets possibles. Dans le premier cas, les compléments alimentaires peuvent augmenter la toxicité du médicament, ce qui est un « cas assez fréquent », selon Irène Margaritis. A contrario, ils peuvent aussi inhiber l’effet de certains médicaments : « Cela peut entraîner une perte de chance pour le patient, sans qu’il s’en aperçoive, ce qui est plus grave encore, dans les cas où le médicament a des conséquences vitales. »

Ces interactions sont rarement indiquées, car elles sont très nombreuses, et pour la plupart encore inconnues. « Les industriels ne font pas forcément les tests, car c’est très difficile à faire », explique la professeure. Pour les identifier, l’ANSES possède un dispositif de nutrivigilance qui permet aux consommateurs de signaler les effets indésirables qu’ils ont ressentis, parfois liés à des interactions médicamenteuses sans qu’ils ne le sachent.

Attention au surdosage

D’autres risques existent lors de la prise de compléments alimentaires, comme le surdosage. Ce dernier peut intervenir lorsqu’un consommateur prend plusieurs compléments en même temps, car ils peuvent contenir la même substance active. « On peut aussi se tromper sur le nombre de gouttes ou de grammes, dans des cas de problèmes d’étiquetage et de compréhension du consommateur », prévient Irène Margaritis.

Certaines substances peuvent aussi se retrouver dans les compléments alimentaires, sans que ce soit indiqué, « de façon accidentelle ou intentionnelle ». « Dans le cadre sportif, ça peut des stéroïdes anabolisants », explique-t-elle. « On a des signalements en nutrivigilance d’effets indésirables qui ne peuvent pas être imputables aux compléments alimentaires » s’il n’y avait pas des substances qui avaient été ajoutées, révèle la professeure qui déplore que « les compléments alimentaires aient été trop banalisés ».

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