Histoires de femmes infidèles : "J'ai avorté de mon amant et il en a été très blessé"

Rear view of a young woman walking on the shopping street in the city.
Rear view of a young woman walking on the shopping street in the city.

En mars 2019, le profil de la femme infidèle type était partagé par un site de rencontre spécialisé : 37 ans en moyenne, cadre supérieure, citadine, mariée depuis plus de cinq ans et mère de deux enfants. Différentes études tendent également à montrer que de plus en plus de femmes se tournent vers l'infidélité (elles étaient 31% à déclarer avoir déjà trompé en 2014, elles étaient 33% en 2016). Qui sont ces femmes ? Quelles sont leurs motivations ? Comment organisent-elles leurs vies ? Ce sont les questions que nous avons voulu poser à certaines d'entre elles.

Si vous aussi vous voulez raconter vos belles histoires de vie, d'amitié et d'amour, vous pouvez envoyer un message à cette adresse : lucilebellan@gmail.com.

Martine a 59 ans et vient d'être grand-mère, ce dont elle est très fière. Elle s'amuse des différences entre cette vie et ce qu'elle a vécu quelques années en arrière : "Je suis mariée depuis mes 25 ans avec un homme avec qui j'ai eu 2 enfants assez vite. C'est mon fils aîné qui a eu un petit garçon cette année. Mais de mes 29 ans à mes 44 ans, j'ai aussi été en couple caché avec un autre homme. J'étais folle de lui, c'était une vraie double vie.

Vidéo. "L'adultère féminin ? On en parle moins mais c'est plus courant qu'on ne l'imagine"

Maman et amante à plein temps

Martine explique comment elle s'organisait pour mener une double vie avec deux enfants en bas-âge : "Mes enfants ont toujours eu une nounou, même si à l'époque je n'avais pas vraiment de travail. Alors même si je veillais à ce que ma famille ne manque de rien, j'avais toujours quelques heures dans la journée pour voir cet homme, qui n'habitait pas très loin de chez moi et travaillait de chez lui. On a organisé notre vie en fonction de nos impératifs. Les jours où mes enfants étaient malades ou pendant les vacances scolaires, on ne se voyait pas du tout, ou alors, si le temps était trop long, on se croisait juste au moment de faire les courses. Avant que les portables se démocratisent, on se laissait des petits mots dans une cache dans mon jardin ou alors j'appelais chez lui quand je pouvais. On a très peu dormi ensemble mais on a réussi à passer quand même beaucoup de temps l'un avec l'autre. Mon mari était souvent absent. Très vite dans notre histoire, j'ai senti que la maternité, la vie de famille, ça allait être des choses que j'allais vivre seule. J'avais besoin d'un homme, d'amour et d'attention dans ma vie. Ça a été un autre homme."

Martine ne regrette rien

Elle est reconnaissante de l'histoire qu'elle a vécue : "Maintenant, personne ne peut imaginer ces aventures, mais à l'époque, je ne tenais que grâce à ça. Cet amour-là fait partie de ma vie et j'en garde un très bon souvenir. J'aurais pu être très malheureuse et très seule. Au lieu de ça, j'ai eu du plaisir, du désir, une personne toujours présente pour écouter mes problèmes et me conseiller. Il n'a jamais rencontré mes enfants évidemment mais en entendait parler sans arrêt. Et j'étais là aussi pour lui, évidemment. Un peu moins en termes de temps disponible mais tout aussi investie quand j'étais à ses côtés. Nous nous sommes apporté quelque chose de sincère, sans penser à mal. J'espère qu'un jour nous aurons l'occasion de parler ensemble de tout ça. Là, cela fait un peu plus de 15 ans que je ne l'ai pas vu. Je sais juste qu'il a déménagé très vite après la fin de notre histoire. Il m'arrive d'entendre parler de lui et ça me donne toujours un frisson. Mais je sens bien que je n'ai plus de sentiments à part une profonde amitié."

Le choix de la double vie pour supporter le quotidien

Martine a bien conscience des risques qu'elle a pris à l'époque : "Il faut imaginer que l'infidélité de la part de la femme, c'était encore plus mal vu que maintenant. Si ça avait fini par se savoir, je n'aurais été soutenue par personne, ni par mes amies ni par ma famille. J'avais aussi peur des réactions possibles de mon mari qui aurait très bien pu décider de demander la garde totale des enfants pour me punir. Si je vivais bien avec mon choix et que j'avais conscience qu'il en allait de ma survie, je savais aussi que personne ne pouvait me comprendre et que j'allais vivre tout ça totalement seule. Pendant et après. Mais il faut croire que j'étais habituée avec mon quotidien de mère et d'épouse. J'ai parfois eu très peur d'être découverte mais ça m'a rendue vraiment vigilante. Je savais que le prix à payer pour cette sensation d'être vivante pouvait être très important. J'aurais tout perdu. C'est quelque chose dont je n'ai jamais vraiment parlé avec mon amant et c'est une discussion que je regrette de ne pas avoir eue avec lui."

Le choix de Martine a stoppé la relation

S'ils ne sont plus en contact, c'est parce que la rupture a été particulièrement difficile à vivre : "S'il n'y avait pas ce point de désaccord, je pense que nous serions restés ensemble pendant encore des années. Mais à un moment, je suis tombée enceinte. J'avais des règles irrégulières à cause de la préménopause et je ne surveillais plus trop tout ça en me disant que mon temps était passé. Je pensais qu'il serait évidemment d'accord pour que j'avorte, parce que la situation n'était pas tenable. Je ne pouvais quand même pas faire croire à mon mari que cet enfant était de lui ou alors tout quitter pour commencer une nouvelle famille. J'étais décidée à avorter mais il en a été blessé. Je pense qu'il a vécu tout ça comme une trahison et il n'a plus été capable de me voir comme avant. Alors, pour éviter qu'il ne continue à souffrir, on a décidé d'arrêter de se voir. Je comprends que cela ait réveillé chez lui une envie de devenir père, ou même d'avoir une famille alors qu'il a toujours, avant ça, privilégié son indépendance. Mais je ne pouvais pas tout bousculer dans ma vie pour cette découverte. Le fait que ma famille compte plus que tout a toujours fait partir du contrat. Et même si je l'aimais, je ne pouvais pas changer ça. Je n'ai jamais regretté cette décision même si la rupture a été difficile à vivre pour moi aussi. Avec le temps, la douleur s'est effacée mais ça a quand même mis des années. Là, je ne garde enfin que le positif."

De la même autrice :

>>Largué.e, délivré.e : “Je suis allé me coucher et quand je me suis réveillé, elle avait pris ses affaires et elle était partie”

>> Le couple à l'épreuve du confinement : "Ça a fait grandir la frustration et on a souvent passé notre colère sur l’autre"

>> Le Grand Swipe : "Elle est arrivée à notre premier date avec 30 min de retard, j’ai failli partir mais j’ai eu une intuition"