6 rencards sur 10 annulés pour des raisons financières : "Être célibataire coûte une blinde, surtout quand on veut faire des rencontres"
Selon une étude menée par la plateforme de rencontre Happn, six célibataires sur dix ont déjà annulé un rendez-vous amoureux pour des raisons financières. L'inflation touche tous les foyers français depuis maintenant plusieurs mois, mais la situation est encore plus compliquée pour les personnes qui vivent en solo. Et ce poids économique a un réel impact sur leur capacité à faire de nouvelles rencontres.
Un premier rendez-vous, ça se prépare. Il faut trouver la personne, évidemment, mais aussi choisir un lieu, une activité, une tenue... En règle générale, les premières rencontres se font autour d'un verre, afin de pouvoir faire connaissance. Mais les célibataires vont peut-être devoir trouver des options alternatives, compte tenu de l'inflation. La preuve ? Six célibataires sur dix ont déjà renoncé à un rendez-vous par manque d'argent.
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L'inflation touche même le secteur des rencontres
Selon les chiffres dévoilés par l'INSEE en avril 2022, treize millions de personnes sont en situation de précarité en France, et la situation s'est aggravée ces derniers mois avec la hausse des prix de l'électricité, de l'essence et de l'alimentation. Résultat : tout le monde est plus regardant sur ses dépenses, à commencer par les célibataires. "Cela nous paraît assez logique qu’avec le contexte actuel il y ait cette angoisse liée au budget, au fait de faire des rencontres et aux coûts que cela implique", confirme Claire Rénier, responsable des tendances pour Happn, à CNEWS. "Cela peut également dépasser le dating. Les gens ont une angoisse personnelle quant au pouvoir d’achat, notamment par rapport au fait d’être plus regardant pour dépenser justement, les rencontres en font partie."
Basil, 31 ans, fait partie de ces gens qui ont décidé de snober temporairement les applications de rencontre, pour des raisons financières. "Avec l'inflation, je galère clairement à ne pas finir dans le rouge tous les mois. Mon budget sorties est limité, alors je préfère passer du temps avec mes potes plutôt que de proposer un date à une meuf et de devoir manger des pâtes jusqu'à la fin du mois. Même si on partage l'addition, et qu'on va juste boire une ou deux bières en terrasse, on en a facilement pour 15 à 20 euros. Soit l'équivalent de mon budget alimentaire de la semaine." Carine, 27 ans, a fait la même chose : "Au début, je laissais les mecs payer l'addition vu que je suis fauchée, je me disais que ça valait le coup de rogner sur mon féminisme pour profiter un peu du patriarcat. Mais comme je sais que les mecs galèrent aussi, je ne veux pas leur imposer ça. Alors les rencontres, on verra plus tard..."
Les célibataires, de plus en plus radins ?
Blaise et Carine ne sont pas les seuls à vouloir rogner sur les dépenses lors de leurs potentielles rencontres amoureuses. En Grande-Bretagne, une étude menée par l'application The Inner Circle et relayée par Stylist affirmait que "l’inflation signifie que 41 % des célibataires deviennent plus pointilleux sur les endroits où ils vont et ce qu’ils font lors de leurs rendez-vous." Une radinerie à laquelle ils et elles sont obligés de se plier pour ne pas mettre leurs finances à mal.
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"Je propose beaucoup des balades dans un parc pour un premier rendez-vous", confirme Héloïse, 22 ans. "C'est bien en été, et on peut éventuellement se poser avec un pack ou une bouteille, ce qui coûte moins cher que d'aller dans un bar. Mais avec l'hiver qui arrive, je vais devoir trouver d'autres solutions pour mes rencards pas chers", regrette-t-elle. "Bien sûr, c'est tentant de proposer une première rencontre directement chez l'un ou chez l'autre", renchérit Carine. "Mais vu le contexte actuel, la plupart des nanas ne veulent pas prendre le risque de se retrouver coincées chez un inconnu, et les mecs avec qui je discute l'ont bien compris, donc ils évitent de le proposer aussi."
Pas tous égaux devant l'inflation
Si les célibataires sont considérés comme de plus en plus radins, c'est aussi parce que ces derniers sont particulièrement touchés par la crise économique. Car à bien des points de vue, il est plus rentable d'être en couple, ne serait-ce que pour partager les dépenses telles que les frais liés au logement : loyer, facture d'électricité, de gaz, d'Internet, mobilier... Divisée par deux, la facture est forcément moins lourde. Beaucoup moins lourde, même, puisqu'une étude publiée dans l'American Journal of Agricultural Economics affirme que les célibataires subissent en moyenne 28% des frais supplémentaires.
Le sujet avait d'ailleurs été largement évoqué par Lucile Quillet dans son livre "Le prix à payer". La journaliste et autrice affirme dans son ouvrage que non seulement les célibataires payent plus, mais que c'est encore plus le cas pour les femmes, qui subissent le coût de la "charge esthétique" avant un premier rendez-vous. Sans oublier le coût de la contraception, bien évidemment. "Être célibataire coûte une blinde, surtout quand on veut faire des rencontres", regrette Louise. "Il faut être belle et bien apprêtée, ce qui coûte évidemment plus cher pour les meufs que pour les mecs, mais aussi dépenser de l'argent pour sortir... Et pour rentrer. Dans mon budget "dating", je suis obligée de compter les trajets en VTC ou en taxi pour rentrer, dépense parfois obligatoire pour assurer ma propre sécurité en tant que femme présente dans l'espace public le soir."
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"Les célibataires payent le prix de leur liberté"
Les frais liés au logement ne sont pas le seul domaine dans lequel les célibataires sont les grands perdants. Loisirs, vacances... Tout coûte bien plus cher quand on est seul que quand on est deux. "Mes potes en couple ont du mal à réaliser que quand on part en vacances tous ensemble, eux dépensent beaucoup moins. Une chambre d'hôtel, ça coûte aussi cher pour une ou pour deux personnes. Eux partagent la note. Moi, je dois choisir entre partager mon espace avec quelqu'un qui n'est pas mon conjoint, ou bien payer plein pot en solo", clame Jill, 41 ans.
Selon cette célibataire endurcie : "Les célibataires payent le prix de leur soi-disant liberté. Que ce soit d'un point de vue économique en devant payer plus, ou d'un point de vue logistique, en dormant dans le clic-clac de la location ou en étant mis à l'écart. C'est une façon de culpabiliser les célibataires et de leur rappeler que l'on vit dans un modèle économique où le couple est considéré comme la norme, que les autres ne sont que tolérés." Et que cette tolérance a un prix.
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