TABOU - Ils refusent de sortir avec des personnes bisexuelles : "Il risque d'être frustré et d'aller voir ailleurs"
Aujourd'hui encore, les clichés autour de la bisexualité sont nombreux. Les personnes bisexuelles ou pansexuelles sont considérées comme plus volages que les autres, et cela nuit à leurs relations amoureuses. Une biphobie qui n'est pas sans conséquences.
Parmi les différents clichés qui entourent la bisexualité – outre le fait que les personnes bisexuelles sont attirées par tous les gens qu'elles rencontrent et qu'elles sont globalement plus ouvertes à l'idée d'un plan à trois – il y en a un qui a la vie dure. Les bisexuel·le·s seraient en effet, aux yeux de bon nombre de personnes, incapables d'être fidèles, plus trompeurs, en totale opposition avec le principe de monogamie. Une façon de penser qui relève de la biphobie, mais qui est malheureusement plus courante qu'on ne le croit.
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"La bisexualité est contraire à mes croyances"
Louise*, 39 ans, possède une liste très précise des critères qu'elle souhaite chez son futur partenaire. "Je n'ai pas de critères physiques, mais j'ai des critères moraux. Je veux que mon futur compagnon ne veuille pas d'enfant, ne soit pas déjà papa, qu'il ait un emploi stable, et qu'il soit hétérosexuel. Pas bisexuel ou bi-curieux, hétéro à 100%", précise-t-elle.
Pour la trentenaire, qui affirme elle-même être "très religieuse" : "La bisexualité n'est pas acceptable dans mon entourage. Je n'ai rien contre les personnes qui font partie de la communauté LGBTQIA+, mais je ne tiens pas à fréquenter un homme qui a eu des rapports homosexuels, parce que c'est contraire à mes croyances. Il paraît que c'est homophobe de le penser, alors je ne le crie pas sur les toits. Mais si je découvre qu'un homme avec qui j'ai eu un rendez-vous a déjà eu un passé avec d'autres hommes, je mets un terme immédiat à la relation."
"Un mec bisexuel va forcément aimer des pratiques que je n'aime pas"
Si la biphobie de Louise est ancrée dans la religion, celle de Jessica*, 23 ans, semble plus liée à des clichés sur la sexualité des personnes bisexuelles. "Je ne me vois pas sortir avec un homme bisexuel car je me dis qu'il aura forcément des goûts qui ne me plaisent pas", explique-t-elle. "Par exemple, je déteste la sodomie, vraiment, ça me dégoûte. Et je me dis qu'un homme qui a déjà eu des rapports homosexuels voudra soit me sodomiser, soit que je le sodomise, selon s'il est plutôt passif ou actif. Or, pour moi, c'est impossible dans les deux cas. Résultat, il risque d'être frustré et d'aller voir ailleurs. Je ne veux pas prendre le risque d'être victime d'infidélité."
Pour la jeune femme, le cliché selon lequel les bisexuel·le·s seraient plus infidèles est "forcément" basé sur "un fond de vérité" : "Je pense que c'est le cas chez les hommes bisexuels plus que chez les femmes bisexuelles", estime-t-elle. "Les hommes ont plus de libido et n'aiment pas se priver de certaines pratiques. D'ailleurs, j'ai l'impression que toutes les personnes polyamoureuses ou en couple libre sont bi. Ce n'est pas pour rien, selon moi."
"Je n'aurais pas confiance en une meuf bisexuelle"
Il n'y a pas que chez les femmes hétérosexuelles que la biphobie a la vie dure. Théo*, 33 ans, refuse également formellement de sortir avec des femmes bisexuelles. "La première fois que j'ai fréquenté une nana bi, je me suis dit que c'était super pour pouvoir faire des plans à trois. Et c'est le cas, coucher avec des meufs bisexuelles, c'est super, elles sont généralement bien plus ouvertes à toutes sortes de pratiques", affirme-t-il. "Mais par contre, je ne me verrai pas avoir une relation monogame avec une femme bi."
Pourquoi ? "Parce que je suis un mec jaloux. Je ne crois pas vraiment en l'amitié homme-femme parce que je pense qu'il y a forcément un sous-fond d'attirance sexuelle. Je n'aime pas que ma copine sorte avec ses copains mecs célibataires, par exemple. Du coup, avec une meuf bisexuelle, je n'aurais confiance en personne. A chaque fois qu'elle irait dormir chez une copine, je me dirais que c'est pour me tromper", conclut-il.
"Mon ex m'a largué en apprenant que j'aimais aussi les hommes"
Thomas*, 34 ans, s'est récemment retrouvé de l'autre côté de la balance en étant victime des clichés sur la bisexualité. En couple avec sa compagne depuis quelques mois, cette dernière a très mal vécu le fait de découvrir qu'il était bisexuel. "On s'est rencontrés sur une application de rencontre, et sur mon profil, c'était clairement indiqué que j'étais bisexuel. Mais c'est vrai qu'on n'en a pas parlé de vive voix, vu qu'on a finalement assez peu parler de nos ex. Je ne suis pas du genre à faire mon coming out à chaque fois que je rencontre une nouvelle personne, parce que je suis profondément monogame. Je ne sors pas avec plusieurs personnes à la fois, je suis exclusif même dans le dating", explique-t-il.
"Quand son petit-frère a fait son coming out récemment, je lui a dit que je pourrai en discuter avec lui, et elle a eu l'air étonné. Je lui ai donc rappelé que j'étais bisexuel. Il s'avère qu'elle n'avait pas lu mon profil et donc qu'elle l'ignorait totalement. Elle m'a reproché de lui avoir menti, et d'avoir sciemment omis de préciser que mon ex, dont nous avions parlé, s'appelle Axel et non Axelle. Personnellement, j'ai trouvé cette confusion assez drôle, jusqu'à ce que je réalise que ça lui posait vraiment un problème."
Les deux jeunes gens ont longuement discuté, et la compagne de Thomas a décidé de mettre un terme à leur relation. "Elle ne parvenait pas à comprendre que ce n'était pas parce que j'aimais les hommes et les femmes que ça voulait dire que j'allais forcément vouloir continuer à coucher avec des hommes. Elle avait peur de ne pas être "suffisante" pour moi. C'était très vexant de me prendre tous ces clichés en pleine figure, mais pour elle, j'étais prêt à faire tout ce travail d'éducation. Tant pis, mais c'est saoulant, on ne va pas se mentir. C'est un peu comme si on disait à un mec qui aime les brunes et les blondes qu'il ne pourra jamais être fidèle à une blonde parce qu'il aime aussi les brunes." Et de conclure : "Il faut arrêter d'associer bisexualité et hyper-sexualité, ce n'est pas la même chose."
* Les prénoms ont été modifiés pour des raisons d'anonymat.
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