Traitées de "folles" et "nymphomanes" parce qu’elles ont une libido importante : "On m'a dit à plusieurs reprises que j'étais une obsédée sexuelle"

Encore aujourd'hui, de nombreuses femmes sont dénigrées si elles expriment trop leurs désirs, comme si l'envie fréquente de sexe était uniquement l'apanage des hommes. Yahoo a recueilli le témoignage de femmes lassées d'être considérées comme des obsédées.

Traitées de
Traitées de "folles" et "nymphomanes" parce qu’elles ont une libido importante : "On m'a dit à plusieurs reprises que j'étais une obsédée sexuelle". Crédit : Getty

Si l'on parle souvent du désir sexuel masculin, en partant du postulat erroné que les hommes ont toujours envie de faire l'amour, à l'inverse, les femmes ayant une libido élevée qui n'ont pas peur d'exprimer leurs envies sont vite dénigrées, qualifiées d'obsédées, de "folles", de prostituées... Voire même de "nymphomanes", alors que ce mot qualifie une réelle pathologie, un trouble du comportement sexuel qui se traduit par une obsession pour le sexe. Ainsi, le judoka Teddy Rinner a récemment évoqué une de ses ex compagnes, très entreprenante et demandeuse, de "folle". En utilisant cet adjectif, il qualifie directement son comportement d'anormal -alors qu'il serait banalisé chez un homme- et le tourne en ridicule. "Quand j’étais jeune, ça m’est arrivé de dire non avant la compétition. Mais j’étais avec une folle à l’époque. Elle se reconnaîtra… Je lui disais : 'Non, non. J’ai la finale demain, je ne peux pas'", a raconté le sportif sur le plateau de "Quelle époque !", en février 2024.

Difficile parfois d'aborder ses envies et/ou de les assumer quand on est traitée de "folle" ou victime de slut-shaming (l'action ou le fait de stigmatiser une femme pour son comportement jugé trop "provoquant"), pour avoir évoqué ses désirs sans tabou. Plusieurs femmes en font malheureusement les frais. S'il faut bien évidemment toujours respecter le consentement de son ou de sa partenaire, certaines femmes se retrouvent face à des personnes qui vont les faire culpabiliser d'évoquer leur goût pour le sexe, allant pour certaines jusqu'à une remise en question complète, quitte à se dénigrer elles-mêmes.

"J'ai toujours eu une énorme libido qui fait que je me suis beaucoup qualifiée moi-même de nymphomane à plus d'une reprise, même si j'ai totalement conscience d'à quel point ce terme est sexiste aujourd'hui. Et on m'a dit à plusieurs reprises que j'étais une obsédée sexuelle. C'est en discutant avec des copines que j'ai réalisé que ma manière d'aborder la sexualité était différente. Je plaignais leurs mecs quand elles me disaient avoir moins de trois rapports par semaine, j'enchainais les plans c*ls quand j'étais célibataire, avec parfois deux partenaires dans la même journée", explique Léonie*, 34 ans. Elle reconnaît avoir elle-même été bercée de clichés très hétéronormés sur la sexualité, et avoir pensé que son intérêt pour le sexe plairait donc à certains : "J'ai déjà eu des jugements de mecs, et les premières fois, j'étais hyper surprise. Je croyais dur comme fer que les mecs avaient toujours envie de b*iser, moi. Du coup j'ai fini par déchanter. D'ailleurs, j'ai même pris l'habitude de mentir quand des mecs me demandaient mon bodycount (le nombre de partenaire sexuels qu'elle a eus ; ndlr), parce que je n'avais pas envie de me sentir jugée en fonction de mon nombre élevé de conquêtes", ajoute-t-elle.

Léonie a finalement décidé de passer outre les a priori, quitte à couper les ponts avec ceux et celles qui la dénigraient : "J'ai connu le slut-shaming, aussi bien de partenaires qui me reprochaient mon body-count, que par des connaissances qui me reprochaient d'enchaîner les plans culs. Ça m'a permis de faire du ménage dans mes relations."

Marjorie*, 22 ans, s'est rendu compte que sa libido était peut-être plus élevée que la moyenne quand elle a eu ses premières relations avec des femmes qui lui ont fait remarquer, après en avoir eu avec des hommes : "À l'époque où je fréquentais des hommes, je n'avais pas peur de parler du fait que j'avais une libido débordante, parce que les mecs de mon âge étaient ravis de pouvoir b*iser n'importe quand. Quand j'ai eu mes premières relations avec des femmes, j'ai une partenaire qui m'a dit : 'Tu sais, je suis pas un mec, t'es pas obligée d'avoir tout le temps envie avec moi.' J'ai été assez surprise parce que je ne simulais pas cette envie, c'était un vrai désir, constant."

La jeune femme, a été, comme Léonie, victime des insultes et des préjugés de son entourage : "Je sais que la nouvelle meuf d'un de mes ex m'a déjà traitée de nymphomane parce qu'il lui a dit que j'avais tout le temps envie de sexe. Je pense qu'il cherchait à la faire culpabiliser... De toute façon, dès qu'une femme aime le sexe et assume d'aimer ça, elle est automatiquement qualifiée de s*lope. Du coup, j'essaye de me réapproprier ce terme.".

*Les prénoms ont été modifiés.

À lire aussi :