Vie de mensonge - Arnaud : "C’était une grosse connerie et c’est possible que j’en paye le prix fort un jour ou l’autre"

Sur les applis de rencontre, Arnaud n'a jamais mentionné ce détail. Pire, il a menti sur cet aspect de sa vie. Arnaud n'a que le bac. Et le jeune actif le vit comme une honte. Pour lui, c'était un mensonge sans conséquence. Aujourd'hui, le jeune homme pense qu'il est possible qu'il en paie le prix fort.

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Vie de mensonge - Arnaud : "C’était une grosse connerie et c’est possible que j’en paye le prix fort un jour ou l’autre" Crédit : Getty

Arnaud a 34 ans et est en couple depuis 2 ans : "J’ai rencontré ma copine sur une application de rencontre. À l’époque, j’avais un peu embelli les choses avec des photos particulièrement flatteuses et une présentation un peu classe. Je me suis excusé des photos au premier rendez-vous et ça l’a fait rire. C’est quasiment le premier truc que j’ai dit. Je ne voulais pas qu’elle ait le temps de penser qu’elle s’était fait avoir. Pour ce qu’il y avait dans ma bio, on n'en a jamais reparlé ou plutôt pas dans les détails. Mais, je commence à voir que mes petits mensonges peuvent déjà être devenus trop gros."

Arnaud a en effet embelli son CV : "J’ai dit que j’étais diplômé, alors que je n'ai pas fini ma première année. Ou, pour le dire autrement, je n’ai pas fait d’études. J’ai été embauché assez vite dans la boîte où j’avais un petit job pendant mes années lycées. Personne ne m’a demandé de diplôme parce que je connaissais bien la boîte et que j’étais embauché pour ça. Mais là, ça fait quelques années et je me sens un peu enfermé dans cette boîte. J’ai eu deux promotions qui m’ont permis d’accéder à un poste pas trop mal payé. Je fais de la comm', j’aime bien. Mais, je veux voir autre chose. Et surtout, je veux me sentir plus utile. C’est des conversations qu’on a très souvent avec ma copine. Elle comprend que je veuille bouger et elle essaie de proposer des choses pour me faciliter la tâche. Mais elle ne se rend pas compte qu’il y a un décalage entre nous. Moi, si je bouge, je sais que je dois soit reprendre des études soit commencer tout en bas de l’échelle. Elle, elle me propose des postes ou des pistes où il faut minimum un bac+3. Je ne sais pas comment lui dire que ça ne sera jamais possible pour moi."

Arnaud se sent piégé dans son mensonge : "Je pensais qu’on aurait jamais l’occasion de parler d’un truc aussi bête. Mais, ça arrive. Elle parle de ses années d’étudiantes et je dois faire semblant d’avoir partagé des expériences du même genre. Alors que je n’ai jamais eu de galères de fin de mois ou de soirées étudiantes. J’ai très vite gagné ma vie par moi-même mais je n’arrive pas à en être fier. J’ai l’impression que je suis passé à côté de quelque chose. Il n’y a qu’à voir à quel point ma copine est proche de ses amis de l’époque. Moi, je n’ai pas de potes comme ça. J’ai fait quelques soirées avec des collègues mais rien de fou. Et avant elle, je n’avais pas eu d’histoire qui avait duré longtemps. J’étais plutôt du genre "éternel célibataire qui chasse sur les applis". Donc je découvre un peu tout ça. Si j’avais eu plus d’expérience, je pense que je n’aurais pas menti. J’aurais su que tout fini par se savoir. Là, je réalise que le fait d’avoir dit une fois que j’ai déjà été en vacances aux Etats-Unis ou que j’ai un diplôme, c’est des choses graves. Surtout parce que je ne peux pas débarquer maintenant et dire qu’en fait c’était faux. Ça casserait toute la confiance qu’elle a en moi. Et elle ne comprendrait pas. Alors que dans le fond, c’est juste que j’avais honte."

Le trentenaire a l’impression que la honte a été le principal moteur de ses mensonges : "Je ne mens pas sur qui je suis. Quand on me rencontre dans la vie, je suis complètement honnête. Mais quand je dois me vendre sur le papier, je panique. Je pense que ce serait pareil pour chercher du travail. J’ai besoin de rencontrer les gens pour leur plaire. Je ne me crois pas capable de convaincre avec juste un CV et une lettre de motivation. J’ai l’impression que ce que j’ai vécu n’a pas de valeur dans le monde dans lequel on vit. Il en faut toujours plus. C’est comme ça sur les applications aussi. On est en compétition avec des beaux gosses qui font du sport, sont riches parce qu’entrepreneurs, ont fait des grandes écoles. Je suis juste un mec normal. Et je pense que ça ne suffit plus pour trouver l’amour. J’adore ma copine mais je ne sais pas comment elle aurait réagi si elle avait su depuis le départ que j’étais un mec sans diplôme. Maintenant on se connait et je sais qu’elle m’aime mais il a bien fallu la convaincre au départ. J’aurais pu ne pas passer la première sélection, on ne saura jamais. C’est cette incertitude qui me fait me dire que j’ai eu raison de mentir. Tout en sachant très bien au fond de moi que c’était une grosse connerie et que c’est possible que j’en paye le prix fort un jour ou l’autre."

Qui sont ces gens qui mentent sur leurs vies, leurs histoires ou leurs personnalités ? Comment en vient-on à mentir ? Pour certaines personnes, il n’est pas possible d’être totalement honnête même auprès de proches ou de personnes aimées. Essayons de comprendre un peu mieux ceux et celles qui mentent malgré l’amour.

Si vous aussi vous voulez raconter vos histoires exceptionnelles, vous pouvez envoyer un message à cette adresse : lucilebellan@gmail.com.

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