Des boîtes de thon polluées au mercure, en quoi cela peut se révéler dangereux pour la santé

Photo d’illustration d’une boîte de conserve de thon. Dans un rapport publié ce mardi 29 octobre, Bloom et Foodwatch alertent sur la contamination du thon au mercure en Europe.
Kinga Krzeminska / Getty Images Photo d’illustration d’une boîte de conserve de thon. Dans un rapport publié ce mardi 29 octobre, Bloom et Foodwatch alertent sur la contamination du thon au mercure en Europe.

SANTÉ - Du pois(s)on dans nos assiettes ? Deux organisations non gouvernementales (ONG), Bloom et Foodwatch, publient ce mardi 29 octobre une enquête alarmante au sujet des boîtes de thon vendues en Europe et notamment en France, dans des supermarchés tels que Leclerc, Carrefour ou encore Intermarché. Sur 150 conserves analysées, 100 % sont contaminées au mercure. Or le mercure fait partie des dix substances les plus préoccupantes au monde pour la santé, selon l’OMS, au même titre que l’amiante ou l’arsenic.

Le thon en conserve contaminé ? Ce que pointe le rapport de ces deux ONG

Le mercure est en effet un métal toxique qui, lorsqu’il est ingéré en grande quantité, peut entraîner des effets graves sur la santé humaine. Lorsqu’il se retrouve dans les aliments, il est imperceptible car sous forme organique, que l’on appelle le méthylmercure. Selon l’OMS, l’exposition à ce méthylmercure, même à de faibles doses, peut entraîner des troubles du développement cérébral, en particulier chez les fœtus et les jeunes enfants.

L’Anses recommande donc aux femmes enceintes d’être particulièrement vigilantes à ce sujet et de « limiter la consommation de prédateurs sauvages, susceptibles d’être fortement contaminés : thon, bonite, raie, dorade, loup (bar), lotte (baudroie)… », pour ne pas transmettre mercure à leur bébé pendant la grossesse.

Mais les risques ne se limitent pas aux fœtus : ingérer du mercure peut également augmenter les risques maladies cardiovasculaires chez l’adulte, provoquer des troubles de l’immunité ou encore de la reproduction. Une exposition prolongée à de faibles doses peut endommager les reins et le système digestif, note également l’OMS. Enfin, le mercure est classé « cancérogène possible » par le Centre international de recherche sur le cancer.

Une norme « sur mesure », spécifique au thon

Faut-il pour autant arrêter de manger du thon, le poisson le plus consommé en Europe ? Le constat est plus compliqué : tout dépend de la quantité ingérée. Les autorités autorisent un seuil de mercure bien plus élevé pour le thon que pour les autres poissons : 1 mg/kg contre 0,3 mg/kg pour le lieu jaune ou le cabillaud, etc. En clair, les thons peuvent contenir jusqu’à trois fois plus de mercure que les autres espèces. C’est précisément ce qui fait bondir les associations : « Le mercure du thon n’est pas moins toxique que le mercure d’une sardine ou d’un cabillaud. C’est incompréhensible », s’indigne Bloom.

Mais si le risque pour la santé est le même, pourquoi autoriser un seuil plus élevé pour le thon ? La justification est explicitement commerciale : cela permet de maintenir la commercialisation de 95 % des prises de thon. « Cela fait plus de quarante ans que l’industrie de la pêche infiltre tous les niveaux de décision réglementaire pour obtenir des normes sur-mesure concernant le mercure dans le thon », explique dans les colonnes du Monde Julie Guterman, principale autrice du rapport. « Elle a réussi : les pouvoirs publics ont décidé de protéger les ventes de thon, au détriment de notre santé. »

Parmi les 150 conserves analysées par les ONG, 57 % ont présenté un taux supérieur à 0,3 mg/kg de mercure – le taux appliqué aux autres espèces – et 10 % dépassaient la norme actuelle de 1 mg/kg.

Ce que recommandent les ONG pour les consommateurs

La pollution au mercure peut provenir de phénomènes naturels, comme les éruptions volcaniques, mais aussi des activités humaines, comme la combustion de charbon, l’industrie minière, ou certaines industries chimiques. Une fois dans l’atmosphère, le mercure se retrouve transporté par le vent sur de longues distances, avant de retomber sur terre ou dans l’eau sous forme de pluie.

C’est ainsi qu’il atteint les rivières, les lacs et les océans et contamine les poissons. Difficile donc de régler le problème à la source, à moins de conclure un accord international pour la protection de l’environnement.

Pour la santé des consommateurs, Foodwatch et Bloom demandent en revanche à la Commission européenne d’appliquer au thon la limite fixée pour les autres poissons (0,3 mg/kg) et aux États membres d’interdire la vente de poissons dépassant cette limite, ainsi que de bannir ces poissons « empoisonnés » des lieux sensibles, comme les cantines scolaires, les crèches, les maisons de retraite, les hôpitaux et les maternités.

Une pétition a également été lancée pour réclamer une plus grande vigilance aux dix plus importants distributeurs du marché européen, dont Lidl, Carrefour, Leclerc et Intermarché, pour espérer réguler la vente de ce poisson.

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