Marine Gandon, sexothérapeute : "Si votre enfant se masturbe, il est important de ne pas réagir de cette façon"

Sexothérapeute et vulgarisatrice scientifique, Marine Gandon a mis au point des ateliers à destination des parents. L'objectif : leur apprendre à communiquer sur l'éducation à la santé sexuelle et affective avec leurs enfants et leurs adolescents. Une conversation pas toujours facile, mais nécessaire à leur épanouissement serein.

En théorie, selon l'article L312-16 du Code de l'éducation, "Une information et une éducation à la sexualité sont dispensées dans les écoles, les collèges et les lycées à raison d'au moins trois séances annuelles et par groupes d'âge homogène." En pratique, la situation est bien différente : rares sont les établissements à se conformer à cette obligation légale, et quand c'est le cas, faute de formation adéquate, les enseignantes et enseignants ne sont pas toujours au fait des informations à communiquer à leurs élèves.

Pourtant, l'éducation à la santé sexuelle et affective est essentielle, dès le plus jeune âge. Elle permet d'aborder la question du consentement, celle de la contraception, ou encore de la lutte contre la propagation des infections sexuellement transmissibles. Si l'école ne s'en occupe pas, deux options s'offrent aux enfants et adolescents : trouver des informations en ligne, quitte à devoir faire eux-mêmes le tri et à être confrontés à des choses au-delà de leur niveau de compréhension. Ou bien, s'enquérir auprès de leurs parents, souvent désarmés à l'idée de parler de sexualité avec leur progéniture.

Vidéo. "Certains parents pensent qu'on apprend à se masturber en cours d'éducation sexuelle"

L'importance de l'éducation à la santé sexuelle et affective

Partant de ce constat, Marine Gandon, sexothérapeute et vulgarisatrice scientifique, a décidé de mettre au point des ateliers à destination des parents. Le tout afin de leur transmettre les bonnes informations à communiquer à leurs enfants, et surtout, leur apprendre à briser le tabou autour de cette conversation souvent redoutée. Et le premier point qui tient à coeur à la spécialiste est de rappeler qu'on ne parle pas d'éducation sexuelle, mais bien d'éducation à la santé sexuelle et affective.

"C'est important de le rappeler, parce que quand on dit éducation sexuelle, certains parents ont l'impression qu'on va apprendre aux enfants à se masturber ou à avoir des rapports sexuels", regrette-t-elle. "Or, l'éducation à la santé sexuelle et affective, ce n'est pas du tout apprendre la sexualité, mais plutôt apprendre la vie ensemble, et notamment les rapports humains, qui vont inclure la sexualité, mais aussi les rapports affectifs."

Elle précise : "Le principe, c'est de sensibiliser les plus jeunes à des sujets clés comme la contraception, le consentement, l'amour aussi."

Une conversation parfois gênante

Marine Gandon en a bien conscience : parler de sexualité en famille n'est pas toujours facile, entre la gêne et la pudeur. "La question du malaise revient souvent dans mes ateliers à destination des parents", confirme-t-elle. Toutefois, la spécialiste estime qu'il y a des façons de contourner le problème, pour le bien-être des enfants et des adolescents. "Soit il faut vraiment briser la glace, en étant gênant, en expliquant :"Tu arrives à tel âge, je te préviens, il y aura une discussion avec tes parents qui sera gênante, mais il faudra l'avoir." On peut aussi apporter du jeu pour rendre ça plus léger. Ou alors, moi, ce que je conseille, c'est vraiment de parler de ressenti."

L'idée ? Plutôt que de donner directement une opinion ou un avis qui pourrait être trop tranché, mieux vaut responsabiliser l'enfant ou l'adolescent face à ce qu'il ressent, pour lui donner une légitimité, et lui demander son avis sur les choses : les relations, ce qu'il voit dans les films..."

Différents thèmes abordés

A son cabinet et en ligne, la sexothérapeute propose différents ateliers : comment aborder la sexualité avec mon enfant, comprendre le développement psychosexuel de mon enfant, le consentement, l'orientation sexuelle, l'identité de genre... Des ateliers directement inspirés par les questions posées par ses patients : "On m'a déjà interrogée sur comment expliquer les érections matinales à un petit garçon, ou comment réagir quand on découvre que son enfant se masturbe", explique Marine Gandon, qui rappelle : "Il faut expliquer aux enfants que c'est OK de découvrir leur corps, mais dans un lieu intime. Et surtout, il ne faut pas diaboliser leur attitude. Il faut vraiment recontextualiser et rassurer l'enfant."

Autre question qui revient souvent : "A quel âge autoriser la première fois ?" Car si la virginité est une construction sociale, le premier rapport sexuel n'en reste pas moins redouté. "Est-ce qu'un parent doit autoriser une première fois ?", s'interroge la spécialiste. "Pourquoi est-ce que le parent se pose cette question ? Où est sa crainte, en définitif ? L'idée, ça va être de rassurer le parent en lui rappelant qu'il ne faut pas fonctionner avec une interdiction ou une permission, mais plutôt d'entrer en échange avec son adolescent, pour s'assurer que tout se passe bien."

"J'invite également les parents à se question sur leur propre malaise", conclut Marine Gandon. "C'est en faisant ce bilan que l'on peut agir."

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