"Vivre et laisser mourir", une scène de viol dans James Bond ? "On ne peut pas parler de consentement éclairé"

Rediffusé ce dimanche 20 août sur France 2 en deuxième partie de soirée, le James Bond "Vivre et laisser mourir", sorti en 1973, n'a pas très bien vieilli. En témoignent plusieurs scènes taxées aujourd'hui de sexistes par les spectateurs, quand d'autres extraits sont eux teintés de racisme.

KINGSTON, JAMAICA - MARCH 1: Roger Moore poses on location for the filming of James Bond film 'Live And Let Die' on March 1, 1973 in Kingston, Jamaica (Photo by Anwar Hussein/Getty Images)
"Vivre et laisser mourir", une scène de viol dans James Bond ? "On ne peut pas parler de consentement éclairé". (Photo by Anwar Hussein/Getty Images)

Sorti en 1973, "Vivre et laisser mourir" met en scène l'espion James Bond (campé à l'écran par Roger Moore), envoyé à New York pour enquêter sur le Dr. Kananga, le dictateur d'une petite île caribéenne, San Monique, ou l'agent des services secrets se rend par la suite. Le film a rencontré un beau succès dans l'Hexagone, puisqu'il a totalisé plus de 3 millions d'entrées dans les salles obscures.

Vidéo. Théories de fans : James Bond ne serait pas un vrai nom, mais un nom de code !

"J'ai été choquée par le sexisme du film"

Néanmoins, cette réussite serait certainement moindre si un tel film faisait son apparition aujourd'hui au cinéma. En effet, comme d'autres films de la saga James Bond, "Vivre et laisser mourir" a -très- mal vieilli. Ainsi, sur le site revisesociology, on peut lire la critique d'une spectatrice contemporaine, qui n'est pas tendre avec le film.

Elle ne fait de suspense quant à son avis : "J'ai été très choquée par l'incroyable sexisme du film. Ce film n'est qu'un exemple supplémentaire du sexisme des représentations des femmes dans les médias il y a 50 an." L'autrice de cette critique remarque ainsi que le film ne comporte que trois "personnages féminins "significatifs"". Sur les trois, James Bond a des relations sexuelles avec deux d'entre elles et les sauve également.

Il l'a manipulée pour qu'elle ait des rapports sexuels avec lui"

Si le personnage de Rosie Carver (campé par Gloria Hendry), chargée d'aider le héros, se révèle assez insignifiant et inutile (on apprend qu'elle a peur des serpents), relégué au rang de potiche, celui de Solitaire (interprétée par Jane Seymour), une médium retenue captive par le principal méchant du film, Tenaka, prend un peu plus de place dans l'intrigue. Mais il n'échappe pas aux clichés sexistes qui collent aux protagonistes féminins de l'époque. Ainsi, Solitaire est vierge, ce qui est essentiel pour qu'elle ait ses pouvoirs psychiques. Mais visiblement, James Bond ne l'entend pas de cette oreille.

"Lorsque Solitaire est de retour sur l'île isolée des Caraïbes qui est la base principale de Tenaka, James se glisse sur l'île et se faufile dans ses appartements pour la sauver, mais pas avant de l'avoir manipulée pour qu'elle ait des rapports sexuels avec lui", décrit la spectatrice. Et de poursuivre : "Il lui fait choisir une carte de Tarot, elle choisit "Les Amants" et ils font l'amour -mais un plan de caméra "insolent" révèle que James Bond avait empilé tout le jeu de Tarot avec rien d'autre que cette seule carte." Pour l'autrice de la critique, il s'agit d'un "viol d'un adulte vulnérable, étant donné que Bond a délibérément utilisé ses croyances contre elle pour la manipuler et l'amener à avoir des relations sexuelles avec lui, je ne pense pas que l'on puisse parler d'un consentement éclairé."

Vidéo. Iris Brey vulgarise le "male gaze" : "Dans Game of Thrones, les scènes de viol sont érotisées"

"Elle n'existe que pour être tuée"

En plus du sexisme et de la culture du viol dont il est empreint, "Vivre ou laisser mourir" met en scène un personnage noir, celui de Rosie Carver, qui tombe dans l'écueil du racisme. Si Solitaire, jeune vierge blanche, est donc l'objet principal du désir de James Bond, Rosie Carver, qui est donc noire, (attention spoiler) meurt dans une scène ultérieure.

Selon Jacqueline Ristola, autrice de l'article "Appropriation culturelle raciste dans Vivre et laisser mourir", Rosie Carver "n'existe que pour être tuée. (...) Sa présence est censée affirmer le caractère culturellement branché de Bond, sans pour autant donner au personnage de la substance ou de l'autorité." L'autrice qualifie même le "Vivre ou laisser mourir" de "résultat le plus mauvais de la franchise" James Bond. À vos risques et périls...

À lire aussi :

>> On ne vit que deux fois, un James Bond raciste ? "Le film est particulièrement offensant"

>> Dame Joan Collins : le documentaire sur la star de Dynastie éclaire sur la culture du viol à Hollywood

>> Injonctions, sexualisation et culture du viol : un rapport dénonce le sexisme dans la publicité