Je milite donc je deviens lesbienne : "Ma soeur refuse de me voir chez mes parents"

Je milite donc je deviens lesbienne :
Je milite donc je deviens lesbienne : "Personne n’a compris et accepté mon choix"

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Dans les années 70, le lesbianisme politique est un courant de pensée issu du féminisme radical. Il se définit par un refus de partager des relations avec des hommes dans l’optique de combattre le patriarcat. Pour certaines femmes aujourd’hui, il est question de sortir de schémas toxiques et de se donner l’opportunité de vivre des histoires d’amour équilibrées. C’est ces histoires que nous allons raconter.

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Pour Rachel, 24 ans et lesbienne politique revendiquée, la transition ne s’est pas fait dans la sérénité : "Cette réflexion s’est construite avec les années. Je ne comprenais pas ce que je fichais avec les garçons de mon âge, du lycée à la fac. Certains ont été maltraitants, d’autres juste nuls. Il y avait du désir en ce qui me concerne mais je ne me voyais pas construire quelque chose avec eux sur le moyen et le long terme. Je sais que ça ne l’aurait pas fait pour moi. J’ai choisi consciemment de faire ma vie avec des femmes. C’est un projet qui m’enthousiasme beaucoup plus. Mais quand j’ai commencé à en parler, il y a 3 ans, j’ai été étonnée de me prendre des réflexions agressives, lesbophobes, moqueuses. Personne n’a compris et accepté mon choix. Ça a fait le vide autour de moi. Des amies que je connaissais depuis le collège ont arrêté de me voir, ma soeur refuse de me voir chez mes parents, mes parents espèrent encore que je change d’avis. J’ai eu une période difficile où il a fallu que j’assume seule ce choix."

De nouvelles relations

Rachel se fait heureusement d’autres amies et rencontre même l’amour : "Je suis célibataire actuellement mais j’étais très amoureuse d’une femme l’année dernière. On s’est séparées parce qu’elle voulait faire le tour du monde et que je ne me sentais pas de vivre une relation à distance aussi longtemps. Peut-être qu’on se retrouvera au bout de tout ça, il y a une partie de moi qui espère encore. J’ai reconstruit autour de moi un cercle d’amitiés fortes, de personnes qui comprennent mon choix et à part quelques vannes de temps en temps parce que j’ai déjà été avec des hommes, je ne me sens pas jugée. Je me sens même enfin faire partie de quelque chose qui me dépasse, un mouvement, une réflexion autour d’un autre modèle de société."

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Elle envisage avoir un enfant dans un futur proche : "Devenir lesbienne n’a jamais empêché d’être mère et je ne remets pas en cause le désir de maternité. C’est quelque chose d’important chez moi depuis toujours. Je veux être mère et je sais que ça se fera hors du modèle du couple même si je rêve de réussir à construire une famille quelle que soit sa forme. Tout est possible tant qu’il y a du respect et de l’amour. C’est très loin de ce dans quoi j’ai grandi mais j’y crois. Je n’ai jamais douté que c’était possible et je veux croire aujourd’hui que c’est possible pour toutes les femmes qui en ont envie d’où qu’elles viennent."

En couple ou pas ?

Rachel envisage également sa vie en dehors de l’injonction à être en couple : "Je pense que quand on réfléchit à d’autres modèles, on se demande aussi forcément pourquoi il faudrait à tout prix être à deux. On vit dans une société où l’amour romantique est primordial. C’est une façon de réussir sa vie, comme une vie professionnelle riche est un signe de réussite. Je veux essayer différentes choses. M’engager dans des associations, me sentir utile. Je veux aussi prendre le temps de développer mon univers, de me laisser guider par mes envies. Pour ça, il faut arrêter de se penser complète forcément à deux et s’engager complète toute seule. Je suis sur ce chemin aussi. C’est des choses qui prennent du temps parce qu’on a peu d’exemples de femmes qui ont essayé de construire et de vivre au quotidien des modèles différents."

Elle se sent plus heureuse que jamais : "J’ai choisi d’avoir des relations avec des femmes et ça a débloqué beaucoup de choses dans ma vie. Je me suis accordé une liberté qui a été très mal vue mais qui m’a permis de faire du tri et de m’entourer de personnes bienveillantes qui partageaient mes réflexions, qui acceptent d’accompagner mon chemin sans jugement. Je me rends compte que de ce choix, en a découlé plein d’autres. Je me sens forte. Je me sens capable de faire des grandes choses. Peut-être pas plus loin que dans mon quartier mais je n’ai pas des envies de changer le monde. Changer mon monde c’est déjà beaucoup. C’est déjà fou. Et peut-être que mon exemple va s’additionner à d’autres et ouvrir la voie pour d’autres femmes. On ne sait jamais. Parfois juste vivre sa vie peut suffire."

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