Augustin Trapenard victimes de violences sexuelles dans son enfance : "Ça fait du mal pour toujours"

DEAUVILLE, FRANCE - SEPTEMBER 10: Augustin Trapenard attends the closing Ceremony during the 48th Deauville American Film Festival on September 10, 2022 in Deauville, France. (Photo by Francois Durand/Getty Images)
Augustin Trapenard victimes de violences sexuelles dans son enfance : "On oublie à quel point ça fait du mal pour toujours". (Photo by Francois Durand/Getty Images)

Augustin Trapenard fait partie du paysage audiovisuel depuis de nombreuses années. Fin intervieweur, le journaliste de 43 ans se confie rarement sur sa propre histoire. Victime de violences sexuelles dans son enfance, il a raconté les conséquences que cela a eu sur lui dans le podcast "Coming Out", mis en ligne ce mardi 14 février 2023.

Journaliste culturel et critique littéraire, Augustin Trapenard est ouvertement homosexuel. Venu s'exprimer sur le sujet dans le podcast "Coming Out", il a d'abord commencé par évoquer ce qu'il avait vécu enfant. Le journaliste a grandi dans une famille "bourgeoise catholique très tradi". "Quand j'étais petit dans les années 80, j'étais un enfant différent. Assez seul, je me réfugiais beaucoup dans les livres", a-t-il décrit.

"J'ai été abusé sexuellement quand j'étais petit pendant trois ans. C'est quelque chose dont je n'ai jamais fait un étendard, mais pour autant j'ai conscience que ce n'est pas la norme, mais que ça existe beaucoup. Si la parole et l'écoute se sont libérées aujourd'hui, il me semble qu'à mon époque, c'était impossible de le dire et qu'on vivait seul avec cette douleur-là. J'avais cinq, six et sept ans" a-t-il raconté.

"Une expérience commune"

Si aujourd'hui Augustin Trapenard témoigne des violences dont il a été victime, c'est aussi parce qu'il estime qu'il est essentiel de montrer à quel point elles sont malheureusement très répandues. "Je trouve ça important de le dire aujourd'hui pour montrer que c'est une expérience commune, qu'énormément de personnes de ma génération ont vécu ça. (...) Pour moi cette expérience est extrêmement banale, et si je ne l'ai pas dit pendant des années, c'est parce que je savais qu'elle était banale, c'est ça qui est troublant. Et c'est magnifique que la parole se libère et que l'écoute se libère, mais si on prenait conscience du nombre d'agressions qui a eu lieu on serait horrifiés."

Le journaliste a constaté à quel point ces violences ont eu un impact sur sa confiance en lui, son rapport au corps et à la sexualité : "J'avais une telle déconsidération de mon corps que j'ai fait n'importe quoi. (...) Très jeune, vers l'âge de 12-13 ans, je me suis laissé embrasser. C'étaient des expériences terribles, absolument pas consenties qui n'avaient rien de tendre, qui n'avaient rien de belles."

Une expérience l'a particulièrement marqué, et il la considère différemment désormais. "À l'âge de 14 ou 15 ans, un rapport sexuel dans un train qui m'a hanté pendant des années avec un homme beaucoup plus âgé. (...) Oui il y a un consentement (...) mais c'est un consentement qui, moi, me semble problématique quand même, aujourd'hui quand je le regarde, et surtout quand je vois les conséquences que ça a pu avoir. Je prends cet exemple là mais il y en a eu mille malheureusement."

"Je n'avais pas spécialement de respect pour qui j'étais"

Augustin Trapenard estime que le traumatisme des violences vécues dans l'enfance l'a longtemps poursuivi et "conditionné" à vivre certaines situations. "On oublie à quel point ça fait du mal pour toujours et à quel point on est "tatoués". C'est-à-dire qu'après pendant des années, c'est comme si les prédateurs pouvaient te retrouver, te voir, te déceler. Je me souviens un jour d'avoir discuté avec ma mère qui me disait 'mais c'est quand même complètement fou ces histoires de gens qui se sont fait violer plusieurs fois' et moi je me disais 'c'est fou comme elle ne sait pas'. Parce que quand tu as été agressé, tu sais que c'est tellement en toi, que tu es une victime idéale, et que tout prédateur va te reconnaître immédiatement, c'est une sorte de fil invisible qui nous relie, c'est atroce".

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Augustin Trapenard est aujourd'hui plus apaisé avec son corps et dans ses relations sexuelles. "Ça a été un très long chemin pour me le réapproprier. (...) Mon rapport au corps n'était absolument pas le même que celles et ceux qui m'entouraient, je n'avais pas spécialement de respect pour qui j'étais, pour ce que je faisais, pour mon corps." Aujourd'hui heureux en amour, le critique littéraire est en couple avec Numa Privat, un homme qui lui a fait découvrir "la possibilité d'une histoire sans violence".

Au micro de "Coming Out", le journaliste a tenu à faire une mise au point : "Ce que je peux dire, et ça j'en suis certain, c'est que mon homosexualité n'a rien à voir avec ce que j'ai pu vivre en étant enfant. Ce que j'ai pu vivre en étant enfant a conditionné certaines choses dans ma vie, certaines douleurs, certaines souffrances, l'homosexualité d'autres, c'est absolument incomparable et c'est important de le noter."

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