Différents d’âge - Margot, 47 ans et Pierre, 72 ans : "Quand on a appris qu'il allait mourir, tout a changé entre nous"

Selon une étude de l’INSEE, 6 hommes sur 10 sont plus âgés que leurs conjointes mais seuls 8% des couples ont plus de 10 ans de différence d’âge. On constate ces dernières années une évolution : l’écart d’âge moyen semble se creuser. Comment vivent ces couples que presque une génération opposent ? Est-il possible de vivre une relation équilibrée quand les deux partenaires ne sont pas au même moment de leurs vies ?

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Margot a 47 ans et son mari, Pierre, en a 72. Ils sont en couple depuis 25 ans : "On s’est rencontrés à un moment où ce n’était pas prévu du tout pour lui et moi. Moi j’étais célibataire et je voulais en profiter encore quelques années avant de me poser. Lui était marié et n’était pas vraiment en crise conjugale. Notre rencontre, via le travail, a tout explosé. Mais on a voulu faire ça bien, parce qu’on est deux grands romantiques. Notre premier vrai baiser a eu lieu après qu’il ait quitté sa femme. Ensuite, il n’y avait plus que nous au monde. Heureusement, il n’avait pas eu d’enfant. On a passé les années suivantes complètement dans notre bulle. Dès qu’on n'était pas au travail, on était ensemble, en autarcie, complètement auto-suffisants. L’âge n’a jamais été une question même si je sais que dans ma famille ça a fait lever quelques sourcils."

Une mise en garde douloureuse mais nécessaire

Le père de Margot cherche à la prévenir qu’un jour leur différence d’âge risque de poser problème : "On a eu une seule conversation sur le sujet. Il m’a demandé si je réalisais que Pierre allait mourir avant moi, ça m’a complètement fermée. Ça n’a pas été plus loin, je lui ai dit que je ne voulais plus jamais parler de ça avec lui. Pendant quelques années, je suis restée un peu froide avec mon père. Je ne comprenais pas qu’il y avait eu de la bienveillance dans son geste."

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En effet, depuis deux ans, Pierre est atteint d’une maladie dégénérative : "Je ne pensais pas parler de la mort et de la maladie avec la personne que j’aime. Je pense que je me voilais la face. Je nous imaginais mourir de vieillesse dans notre lit, ensemble. Je sais bien sûr que ça ne se passe jamais comme ça mais c’est comme d’imaginer qu’on risque d’être seul un jour, on préfère se mettre des oeillères que de se préparer. Quand on a appris que Pierre était malade et que c’est ce qui allait le tuer, ça a tout changé entre nous. Je l’aime toujours mais je suis aussi devenue son aidante. Et je sais que les prochaines années, je vais les passer à m’occuper de lui. Je sais aussi qu’après ça, il y aura un vide dans ma vie."

"La suite de l'histoire, c'est qu'il va mourir avant moi"

Margot a changé d’attitude et a décidé de parler avec des femmes qui ont vécu l’expérience qu’elle est en train de vivre : "Je laisse à Pierre le soin de se concentrer sur le fait de vivre au mieux sa maladie, de nous donner les clés pour l’aider un maximum et moi de mon côté, je fais tout pour être en forme, disponible pour lui et surtout tenir la longueur au niveau moral. J’ai rencontré des femmes d’autres malades et on a parlé ensemble de ce qu’il faut faire. J’ai appris par exemple qu’il fallait que je n’oublie pas de me garder du temps pour moi, ce qui n’était pas évident pour moi au départ. J’essaye aussi d’intégrer d’autres personnes à notre mode de vie, comme la soeur de Pierre qui est ravie d’aider. Quand Pierre ne sera plus là, je sais que je pourrais compter sur elle pour avoir un sentiment de famille. L'objectif c’est que je ne me retrouve pas du jour au lendemain sans personne et sans but."

Margot ne regrette rien : "Je suis dévastée que Pierre souffre, mais en dehors de ça, je referais exactement les mêmes choix. Je ne me suis jamais dit que j’aurais dû faire ma vie avec un homme plus jeune, qui serait resté en meilleure santé plus longtemps. Déjà parce que ce n’est même pas assuré. Il y a des gens qui ont des cancers à tous les âges. Ensuite, j’aime profondément Pierre, et ça fait partie de l’amour d’accompagner la vie jusqu’au bout, "jusqu’à ce que la mort nous sépare". On sait que la suite de l’histoire c’est que, sauf accident, Pierre va partir avant moi. Maintenant, on va tout faire pour continuer à se créer des souvenirs, continuer à s’aimer, continuer à profiter l’un de l’autre. Oui, la maladie est là. Oui, la mort va arriver. Mais j’ai appris à réaliser que ça fait aussi partie de l’amour. Si l’amour a autant de valeur c’est toujours parce que ça s’arrête un jour, d’une manière ou d’une autre."

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