"Rosalie" : qui est Clémentine Delait, la femme à barbe qui a inspiré le film ?

Ce mercredi 10 avril 2024, "Rosalie" sort en salles. Le film, qui met en scène Nadia Tereszkiewicz et Benoît Magimel, est inspiré de la vie de Clémentine Delait, une femme à barbe française déterminée.

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"Rosalie" : qui est Clémentine Delait, la femme à barbe qui a inspiré le film ? Photo : ©Marie-Camille Orlando - 2023 TRESOR FILMS - GAUMONT - LDRPII - ARTÉMIS PRODUCTIONS

Dans les années 1870, Rosalie vit avec un lourd secret : depuis sa naissance, son visage et son corps sont recouverts de poils drus et foncés. Elle se rase par peur du rejet. Elle réussit même à cacher son hirsutisme à Abel, un tenancier de café endetté, qui l'épouse pour sa dot. Un jour, elle décide de laisser de pousser sa barbe. Voilà le synopsis de "Rosalie", le film de Stéphanie Di Giusto, avec Nadia Tereszkiewicz (Rosalie) et Benoît Magimel (Abel), disponible au cinéma dès ce mercredi 10 avril 2024.

Plus encore, "Rosalie" est inspiré de l'histoire vraie de Clémentine Delait, une Française qui a réellement existé et a fait de sa différence une force.

Un pari qui change tout

Née dans les Vosges en 1865, Clémentine Clattaux a écrit "Mémoires", afin d'y raconter son histoire. "Comment la barbe m'a poussé ? Je l'ignore. Mais je peux assurer qu'à 18 ans, ma lèvre supérieure s'agrémentait déjà d'un duvet prometteur", a-t-elle ainsi écrit. À 20 ans, elle épouse Paul Delait, un boulanger avec qui elle monte un café au bout de sept ans d'union.

En 1900, Clémentine Delait tient un bar en Lorraine, à Thaon-les-Vosges, une petite ville de 5 000 habitants. C'est un pari qui va changer sa vie : un homme fréquentant son établissement, déjà habitué à voir sa moustache, qui lui permet de s'imposer face à certains clients difficiles, la met au défi de ne plus raser sa barbe. Si elle s'exécute pendant quinze jours, elle aura environ l'équivalent de 5 000 euros.

Avant même qu'elle accepte ce défi, le commerce de Clémentine Delait et son mari prospérait. Il faut dire que la moustache, et la carrure (elle pèse près de 100 kilos à 40 ans) de la patronne attirent les curieux. Bien qu'elle relève le défi lancé par le client, la commerçante ne verra jamais la couleur des 5 000 euros promis. Mais ce qu'elle gagnera ensuite grâce à sa barbe est bien plus impressionnant.

"J'étais beaucoup plus que cela"

D'abord, sa clientèle, déjà nombreuse, va encore augmenter, si bien qu'elle renomme son commerce "Le Café de la Femme à barbe". En véritable businesswoman, elle fait imprimer des cartes postales avec différentes photos d'elle, et, plus tard, ouvre même un magasin de lingerie fine qui est un véritable succès. Elle fait également la Une du "Petit Journal", un des plus grands journaux de l'époque.

Clémentine Delait est même sollicitée pour rejoindre des troupes de cirque, ce qu'elle refuse à chaque fois. "Il ne me vint pas l'idée que je ne pouvais être qu'une femme curieuse exhibée. J'étais beaucoup plus et mieux que cela", a-t-elle raconté dans ses mémoires. Lorsqu'elle accepte néanmoins d'entrer dans la cage aux lions pendant un spectacle de cirque renommé, elle commence à se faire connaître à l'international. Les rois d'Espagne et d'Égypte demandent à la voir, elle rencontre le Schah de Perse... C'est une véritable star.

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"Mon mari prenait plaisir à me caresser la barbe"

Sur le plan intime, les poils de Clémentine Delait ne posent visiblement pas de problème à son mari : "J'avais une barbe magnifique, frisée, fournie, qui s'épanouissait en un double panache sur ma poitrine. Mon mari prenait plaisir à me la caresser, et moi-même je ne voyais pas ce nouvel ornement de mon visage sans une coquetterie amusée et satisfaite." Un physique qui séduit aussi les femmes : quand elle obtient l'autorisation de se vêtir "en homme", elle décide de se faire confectionner un costume sur mesure. Elle affirme dans ses mémoires que la vendeuse qui l'accueille dans son magasin, pensant qu'il s'agit d'un homme, est tombée sous son charme : "Je m'amusais follement, d'autant mieux que la jeune fille minaudait, faisait la belle, et que je n'aurais qu'un mot à dire pour achever de la troubler. En la quittant, je lui serrai la main, et elle rougit. Sans doute attendait-elle mieux..."

Après le décès de son mari Paul, en 1928, Clémentine Delait accepte finalement de partir en tournée et voyage à travers le monde. Le 19 avril 1939, elle meurt d'une crise cardiaque. Sur sa pierre tombale, elle avait exigé qu'on écrive : "Ci-gît madame Delait, la femme à barbe de Thaon."

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