"J'ai l'habitude de penser à sa place" : victimes de la charge mentale estivale, les femmes rentrent de vacances épuisées et leurs conjoints le savent très bien
Les vacances d'été s'achèvent pour bon nombre de familles, et la rentrée scolaire se profile pour les enfants. Mais pour beaucoup de femmes, les congés d'été n'ont pas forcément eu un goût de vacances. Selon une étude Ifop pour Bons plans voyage New York, 70% des femmes rentrent de congés en étant fatiguées. Et sans surprise, c'est encore et toujours une question de charge mentale et de répartition des tâches domestiques.
Le sujet de la charge mentale a beau être dans tous les médias et sur toutes les bouches, la situation semble loin d'évoluer dans la bonne direction, bien au contraire. En témoigne la dernière étude* de l'Ifop pour Bons plans voyage New York, qui dévoile que 70% des femmes rentrent "beaucoup plus fatiguées" que leur conjoint ou que les hommes de leur famille, à l'issue des vacances. Pire : plus d'un homme sur deux reconnaît avoir parfaitement conscience de ce fossé, qui touche principalement les femmes en couple hétérosexuel. Si l'été est propice au farniente, la charge mentale, elle, ne prend pas de vacances.
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Les hommes sont en majorité en charge du barbecue
Les chiffres de cette étude n'ont malheureusement rien de surprenant. 53% des femmes déclarent s'être davantage chargées des tâches domestiques pendant les vacances, 69% d'entre elles se sont occupées de la lessive. De leur côté, ces messieurs sont seulement 28% à s'être occupés de la cuisine... Sauf dans le cadre du sacro-saint barbecue, seule tâche des vacances à être gérée majoritairement par les hommes.
En parallèle, pour les couples partis avec des enfants, c'est encore une fois maman qui porte la charge mentale : ce sont en effet les mères qui se sont massivement chargées de faire les valises de leur progéniture (71%, contre 12% des pères), de l’entretien quotidien de leur linge (72%, contre 13%) ou de préparer leurs repas en cas d’activités extérieures (53%, contre 17%).
Face à ces chiffres, il n'est pas surprenant de constater que les femmes rentrent épuisées. 56% des pères de famille sondés affirment d'ailleurs être parfaitement conscients que leur épouse en fait plus. Ce qui ne les a visiblement pas empêchés de se tourner les pouces.
"Mon mari n'avait pas pensé à regarder les dates de la rentrée"
Mélissa, 33 ans, est partie en vacances à l'étranger pendant deux semaines avec son mari et leurs deux enfants. "Pour moi, la charge mentale des vacances commence même avant les vacances", explique-t-elle. "À l'origine, c'était mon mari qui devait réserver notre séjour, et il a réservé deux semaines, à cheval sur août et septembre. Date de retour prévu : le 6 septembre. Sauf que la rentrée scolaire des enfants, c'est le 4. Il n'y avait pas pensé, il a fallu tout décaler, faire les démarches, payer des frais supplémentaires... Une vraie galère."
Par la suite, la mère de famille s'est occupée des bagages de toute la petite famille, à l'exception de la valise de son mari. "Il s'est rendu compte la veille du départ qu'il n'avait pas mis son teeshirt préféré à laver, qu'il n'avait pas de claquettes pour la plage, ni de maillot de bain. Et évidemment, il a aussi oublié son gel douche et sa brosse à dent le jour du départ. Heureusement, j'ai l'habitude de penser à sa place."
La jeune trentenaire avoue être désabusée : "Je fais partie de cette génération de femmes qui a le cul entre deux chaises. D'un côté, j'ai été élevée par des parents qui estiment que les femmes doivent s'occuper de leur famille, et de l'autre, je suis profondément féministe. C'est dur pour moi de trouver l'entre-deux. Et parfois, faire les choses plutôt que d'être la maman et l'épouse qui râle, ça va plus vite, et ça permet de conserver une bonne ambiance." Une réaction peu surprenante aux yeux de François Kraus, directeur du pôle "genre et sexualités" à l'Ifop, qui l'affirme : "Cette dévolution passéiste de l'organisation des vacances aux femmes repose sur une vision indéniablement conservatrice de leur temps libre et une injonction sociale très forte : faire passer le bien-être de leur famille avant leurs propres besoins… En ce sens, appréhender les vacances sous le prisme du genre permet de montrer que la trêve estivale ne remet pas en cause les modèles conjugaux et familiaux inégalitaires, voir même qu’elle les aggrave. Pourquoi ? Parce que si l’activité professionnelle d’une femme légitime une répartition du travail domestique plus égalitaire, les moments d’inactivité comme les vacances favorisent un retour en arrière à son rôle "naturel" : s'occuper avant tout de ses enfants et de son foyer."
"J'ai rompu avec mon ex à cause de son attitude pendant les vacances"
On dit souvent que la charge mentale peut être un motif de rupture, et pour Kristel et son ex-compagnon, cela a été le cas. "Nous étions ensemble depuis un peu plus de deux ans, mais c'est la première fois que nous avions l'occasion de partir juste tous les deux, pour plus d'un week-end, et surtout : pas dans un hôtel." Pour faire des économies, le couple a en effet décidé de louer une maison de vacances. "Je me suis chargée de l'organisation et des réservations, mais je pensais que sur place, on ferait tout ensemble : le ménage, la cuisine... Cruelle erreur."
En effet, au bout de deux jours, Kristel constate que lorsqu'ils ne vont pas au restaurant, son compagnon a la mauvaise habitude de se mettre les pieds sous la table. "Il n'a pas voulu aller faire le marché avec moi, n'avait jamais aucune idée de ce qu'il veut manger, et il estimait que c'était mon rôle de faire la cuisine et le ménage. Quand je lui ai dit que j'étais moi aussi en vacances, il m'a répondu texto : 'Les vacances c'est pour le travail, pas pour les tâches ménagères.' J'étais scandalisée." La jeune femme ne vivait en effet pas avec son compagnon, qui habitait toujours chez ses parents. "J'ai réalisé que, comme on se voyait toujours chez moi, il trouvait ça normal que je sois toujours en charge de la cuisine, du ménage, et que même si on emménageait ensemble, il n'allait probablement pas changer de sitôt. À notre retour, j'ai décidé de le quitter, je ne pouvais plus supporter son attitude. Et je me dis que ces vacances m'ont sauvée."
*Étude Ifop pour Bons Plans Voyage New York réalisée par questionnaire auto-administré en ligne du 18 au 21 août 2023 auprès d’un échantillon de 2 004 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, incluant 1 364 personnes en couple.
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