"Ça influence beaucoup et c’est très dangereux" : zoom sur le Mukbang phénomène food sur TikTok

Originaire de Corée du Sud, le Mukbang est aujourd'hui l'une des plus grandes tendances food avec 6,2 milliards de vues sur TikTok. Le but ? Se filmer en ingérant une très grande quantité d'aliments en un temps record. Outre le fait d'être dangereux pour la santé, cette pratique, devenue virale sur les réseaux sociaux, influence la jeune génération.

"Ça influence beaucoup et c’est très dangereux" : zoom sur le Mukbang phénomène food sur TikTok <p>Crédit : Getty</p>
"Ça influence beaucoup et c’est très dangereux" : zoom sur le Mukbang phénomène food sur TikTok

Crédit : Getty

Très populaire en Asie et notamment en Corée du Sud depuis 2009, le Mukbang est parvenu à traverser les océans et à devenir un phénomène mondial sur les réseaux sociaux. Ce mot coréen correspond à l'association des termes "manger" et "diffuser". Le concept est simple, il s'agit de se filmer en plein repas et de manger une grande quantité d'aliments le plus rapidement possible. Certains internautes, aujourd'hui créateurs de contenus reconnus et influenceurs, se voient même être rémunérés pour certaines de leurs vidéos. Afin d'attirer le plus de vues possibles, ils ne lésinent pas sur le trash avec des plats peu équilibrés et une succession de "junk food", à base de pizzas, de burgers, de pâtes et autres mets à la fois salés et sucrés. Pas très appétissant, ce type de vidéo génère cependant un grand nombre de likes et une véritable communauté s'est formée autour du #mukbang.

Parmi les plus célèbres influenceurs, on retrouve Nikovocado Avocado (3,1M followers sur TikTok), ancien youtubeur vegan connu pour avoir pris plus de 100 kg en un an, Allanfoodchallenge (286,4K Followers sur TikTok et 804K sur Youtube) youtubeur démasqué pour avoir monté ses vidéos et le TikTokeur américain Waffler69 décédé à l'âge de 33 ans suite à des complications cardiaques. Outre le fait d'attiser les moqueries et de représenter un véritable gouffre financier pour les créateurs, ces vidéos de plusieurs heures inquiètent les professionnels de santé et sont aujourd'hui sources de troubles des conduites alimentaires chez la jeune génération.

"Ça va avoir un effet dévastateur sur des personnes qui souffrent déjà de troubles du comportement alimentaire"

Selon une étude réalisée par le site officiel de La journée mondiale du TCA, les troubles des conduites alimentaires toucheraient plus de 900 000 enfants, adolescents et adultes français en 2023. Alexandra Retion, diététicienne et nutritionniste explique que ces vidéos mettent en scène "quelque chose que nous, soignants, tentons de prendre en charge". En plus d'attiser les moqueries et les commentaires haineux sur les réseaux sociaux, les vidéos de Mukbang (aussi connues sous le terme de "food craving") impactent les comportements alimentaires. "Le corps n’est pas fait pour manger autant… Il y a un risque d’obésité du fait d'ingérer autant de calories, et après, au niveau psychologique, des troubles du comportement alimentaire comme l'anorexie, la boulimie et l'hyperphagie". L'experte alerte et précise que ces vidéos ont un effet dévastateur sur des personnes qui souffrent déjà de troubles des conduites alimentaires : "Le fait de voir des individus qui mangent beaucoup ou qui se privent sur les réseaux sociaux, ça influence beaucoup et c’est très dangereux".

Prises comme exemples par beaucoup de jeunes, ces alimentations trop riches peuvent être perçues comme la normale, ou bien, au contraire, impacter négativement le rapport à la nourriture. Lors d'une interview pour la télé-réalité "Real Housewifes of Beverly Hills", l'actrice américaine Lisa Rinna est revenue sur le combat contre l'anorexie que mène sa plus jeune fille Amélia, qui utilisait pendant son adolescence ce type de vidéos afin d'annihiler son envie de manger.

Quelles sont les recommandations des professionnels de santé ?

Maladies psychiatriques reconnues, les troubles des conduites alimentaires ne sont pas à prendre à la légère et doivent être encadrés par des professionnels de santé. Alexandra Retion est claire sur le sujet : "C’est quelque chose qui doit être pris en charge de façon pluridisciplinaire avec un diététicien, un psychologue et un médecin. Les psychiatres sont aussi très efficaces". L'experte affirme que les réseaux sociaux sont à éviter et que ces influenceurs ne sont pas des professionnels de santé qui donnent des conseils sur la bonne manière de s’alimenter.

Cependant, pour les personnes encadrées, mais touchées par un TCA, Alexandra Retion adresse quelques conseils. D'un point de vue nutritionnel, "la quantité recommandée dépend de chaque personne, de vos besoins, de votre morphologie, de votre âge, de votre activité physique. Le maximum, c'est quand vous commencez à sentir la digestion, le cerveau envoie un message de satiété au bout de 20 minutes". En plus d'une alimentation équilibrée et d'une activité physique régulière, il est donc recommandé d’écouter ses sensations de faim et de satiété sans se priver ni se forcer.

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