Je milite donc je deviens lesbienne : "Je l’ai fait quand j’ai appris que ma grand-mère était amoureuse d'une femme"

Je milite donc je deviens lesbienne : "Je l’ai fait quand j’ai appris que ma grand-mère était amoureuse d'une femme". Photo : Getty Creative
Je milite donc je deviens lesbienne : "Je l’ai fait quand j’ai appris que ma grand-mère était amoureuse d'une femme". Photo : Getty Creative

Dans les années 70, le lesbianisme politique est un courant de pensée issu du féminisme radical. Il se définit par un refus de partager des relations avec des hommes dans l’optique de combattre le patriarcat. Pour certaines femmes aujourd’hui, il est question de sortir de schémas toxiques et de se donner l’opportunité de vivre des histoires d’amour équilibrées. Ce sont ces histoires que nous allons raconter.

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Béatrice a 34 ans quand elle décide de ne plus avoir de relations sentimentales et sexuelles avec des hommes : "Je sortais d’une relation abusive avec un homme qui avait toujours été à deux doigts de lever la main sur moi. J’étais en train d’envisager de rester célibataire et puis, par hasard, ma mère m’a demandé de venir l’aider à ranger son grenier chez elle. Elle voulait déménager et avait besoin de faire du tri. J’y suis allée sans me dire que ça allait changer ma vie."

La trentenaire retrouve des albums de photos de famille : "On n’est pas très photos à la maison. Ma mère n’a aucun cadre chez elle. Alors la plupart de ces photos, je ne les avais jamais vues. J’avais déjà vu quelques clichés de ma grand-mère maternelle, mais pas du tout comme je l’ai découverte là. Elle posait avec une femme, son bras autour de sa taille. Elle avait la cigarette à la bouche. J’ai demandé à ma mère de me raconter son histoire. C’est là que j’ai découvert qu’elle était lesbienne."

"Elle avait dû se cacher et se marier avec un homme"

Béatrice a déjà pensé choisir les femmes plutôt que les hommes : "J’avais un problème de légitimité et j’avais peur de me faire juger. Mais je l’ai fait quand j’ai appris que ma grand-mère était lesbienne. Je l’ai fait pour moi autant que pour elle. Elle, elle avait dû se cacher et même se marier avec un homme alors qu’elle était amoureuse d’une femme. Elle avait dû porter ses enfants. Je la remercie de l’avoir fait sinon je n’aurais jamais été là pour en parler, mais j’imagine combien ça a été dur pour elle. Elle s’est forcée toute sa vie à être une personne qu’elle n’était pas. Moi j’avais toutes les raisons du monde d’essayer de me mettre en couple avec une femme et je vis dans un monde bien moins homophobe que le sien, même s’il l’est encore. Je me suis dit que c’était la chose la plus logique à faire."

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Pour elle, ça a d’abord impliqué seulement un changement sur l’application de rencontre qu’elle utilisait : "Ça m’a pris moins de deux minutes pour préciser que je cherchais des femmes et plus des hommes. Je n’ai même pas eu de phase de transition où je cherchais encore les deux. Avec les femmes avec qui ça a matché, j’ai parlé de ce que j’étais en train de vivre et si certaines ne l’ont pas bien pris, d’autres ont compris et accepté. J’ai eu deux histoires coup sur coup et ces deux femmes sont restées des amies. Je n’ai pas ressenti le besoin d’en parler à mes proches avant qu’il ne se passe quelque chose de sérieux. La seconde, je l’ai présentée à mon vieux groupe d’amis et à ma mère. Mais il n’y a pas eu de grande annonce ou de coming-out."

Un tatouage pour rendre hommage

Béatrice a désormais un tatouage qui lui rappelle sa grand-mère : "Ça peut paraître bizarre mais j’ai l’un des portraits de ma grand-mère tatoué sur le biceps. Elle est toujours avec moi et elle me donne de la force. Je pense que c’est important pour tout le monde de se renseigner sur sa famille. Côté cœur, je débute à peine une nouvelle histoire avec une femme qui me plait beaucoup. J’ai l’impression d’être déjà amoureuse alors que je ne l’ai vue que deux fois."

Elle donne à sa décision des accents mystiques : "J’ai l’impression que c’est ma grand-mère qui a essayé de me dire quelque chose au moment où j’en avais besoin. Je ne suis plus la même maintenant. Je n’ai plus peur comme avant et je me sens moins victime, de manière générale, dans les relations. On me respecte alors je me respecte. Je suis devenue une femme dont je peux être fière. Ma mère m’a aussi dit récemment qu’elle était fière de moi. Tout ça, je le dois à ma grand-mère. C’est fou, la force d’une photo dans un grenier."

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